« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.


jeudi 12 novembre 2020

La soumission de la femme, motif de refus de la nationalité française


Le droit positif offre de multiples instruments de nature à lutter efficacement contre l'islam le plus radical, celui qui refuse de se soumettre aux principes républicains. En témoigne l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 9 novembre 2020 qui admet la légalité d'un refus d'acquisition de la nationalité française, au motif que le demandeur "ne pouvait être regardé comme assimilé à la communauté française". 

 

Le refus d'acquisition de la nationalité

 

Aux termes de l'article 21-2 du code civil, un étranger qui contracte mariage avec un Français peut, une fois passé un délai de quatre ans après le mariage, acquérir la nationalité française par simple déclaration. Encore faut-il que la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux et que le conjoint français ait conservé sa nationalité. Sur ce point, la loi ne fait qu'appliquer aux étrangers le principe posé par l'article 215 du code civil, applicable à tous les mariages, qui énonce que "les époux s'engagent mutuellement à une communauté de vie". Dans le cas des couples dont un conjoint étranger veut obtenir la nationalité française, cette communauté de vie fait l'objet d'un contrôle réel, le juge s'assurant qu'ils partagent le domicile conjugal.

De ces dispositions, certains déduisent qu'il suffit à un étranger de contracter mariage avec un Français ou une Française pour obtenir la nationalité, à l'issue quatre années de patience. C'est faux, car l'article 21-4 de ce même code civil énonce : " Le Gouvernement peut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger" dans un délai de deux ans à compter de la déclaration faite par l'intéressé. Le gouvernement a donc la faculté d'empêcher l'acquisition de la nationalité d'un étranger qui refuse de se plier aux règles en vigueur dans notre société. 

 

Assimilation v. Intégration

 

Observons que le droit français emploie ici le terme d'"assimilation", terme rejeté par certains militants du droit des étrangers qui préfèrent évoquer l'"intégration". La distinction n'est pas de pure forme. L'intégration pense en termes de communautés dont on admet qu'elles puissent vivre en France, adopter la nationalité française, tout en conservant leurs moeurs, voire leur droit personnel. L'assimilation, en revanche, notion qui est celle du droit positif, repose sur une insertion de l'individu dans la société française, et la renonciation aux règles qui ne sont pas conformes à son droit. Cela ne signifie pas que l'étranger renonce à son identité culturelle ou religieuse, mais sa vie sociale doit témoigner de son attachement à la société française.

C'est précisément pour défaut d'assimilation que le requérant s'est vu refuser la nationalité française. Lors des entretiens qui ont lieu durant cette procédure, les fonctionnaires de la préfecture de l'Oise ont en effet observé qu'il avait adopté un mode de vie "caractérisé par une soumission de sa femme qui ne correspond pas aux valeurs de la société française, notamment l'égalité entre les sexes".  Derrière le statut subordonné de la femme apparaît, à l'évidence, la pratique d'un islam rigoureux. Et le refus de la nationalité est alors parfaitement licite, le Conseil d'Etat se bornant à constater l'exactitude matérielle des faits.

 


  

Les Indégivrables. Xavier Gorce


Une jurisprudence solide


Cette décision ne doit pas être considérée comme le témoignage d'une tendance nouvelle qui marquerait un niveau d'exigence plus grand depuis les récents attentats. Mais il n'en est rien, car le Conseil d'Etat a toujours admis la légalité de ce type de refus. Des arrêts du 27 novembre 2013 et du 25 février 2015 reprenaient déjà exactement la même formulation, en se fondant également sur la soumission de la femme. Cette jurisprudence ne concerne pas que les hommes, et, quelques jours avant l'arrêt du 9 novembre, le Conseil d'Etat, le 6 novembre 2020, avait admis le refus d'acquisition de nationalité d'une épouse ayant adopté un "mode de vie caractérisé par une soumission à son mari".

Ce refus d'assimilation peut parfois prendre une allure particulièrement provocatrice. L'arrêt du Conseil d'Etat du 11 avril 2018 admet la légalité d'un décret du Premier ministre refusant la nationalité à une femme d'origine algérienne qui avait refusé de serrer la main du secrétaire général de la préfecture lors de la cérémonie d'accueil dans la nationalité. En l'espèce, le droit en vigueur permet à l'autorité administrative de refuser la nationalité dans un délai de deux ans après la déclaration, ce qui signifie que la cérémonie d'accueil ne crée pas de situation irrémédiable, ce qu'ignorait sans doute la requérante.

Sur ce point, la jurisprudence est donc ferme, et l'on ne trouve de décision annulant un tel refus d'acquisition de la nationalité. Il est vrai que les dossiers sont généralement clairs, et la volonté de vivre en dehors des règles qui sont celles de la société française est affirmée clairement, soit lors des entretiens avec les agents de la préfecture, soit lors d'une cérémonie lors de laquelle de multiples témoins peuvent attester du refus de serrer la main d'un homme. La norme juridique prévoit le respect des droits de la défense et exige des faits avérés pour pouvoir écarter la déclaration de nationalité. Elle n'emporte donc pas d'atteinte aux droits de l'homme, d'autant qu'il s'agit, avant tout de protéger ceux des femmes.

En revanche, ces dossiers sont peu nombreux, sans doute parce que les préfectures n'ont pas toujours les moyens de faire des enquêtes systématiques. Il suffirait donc d'intensifier les contrôles pour éviter d'accueillir dans la nationalité française des étrangers qui n'ont pas la moindre intention d'en adopter les règles. Une bonne manière de lutter contre le "séparatisme" sans porter atteinte à l'état de droit.


Sur le droit des étrangers : Manuel de Libertés publiques version E-Book et version papier, chapitre 5, section 2.

 

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Merci pour vos articles, toujours très clairs, souvent engagés (ce qui en pimente la lecture), mais l'analyse est cette fois-ci franchement partiale (voire partielle).
    1) Vous avez, à raison, été prompte à critiquer l'absence de véritable motivation par le CE de ses arrêts durant le premier confinement. Pourtant, bien que reprenant largement les arguments du Gouvernement, ils en demeuraient largement plus motivés que les arrêts que vous citez sur l'absence d'assimilation, qui ne reprennent pas même les arguments du Gouvernement. Il est donc strictement impossible au lecteur de comprendre véritablement quels sont les faits traduisant une "absence d'assimilation" ou "un comportement de soumission de la femme". Par exemple, le simple fait de porter le voile constituerait-il une telle soumission ? Ou alors ces femmes seraient-elles candides à ce point d'avouer elles-mêmes être soumises ?
    2) Quant au fait de refuser de serrer la main du préfet, je trouve extrêmement liberticide d'en faire un motif d'opposition à l'acquisition de la nationalité. De prime abord, rien n'indique qu'il s'agit d'un refus discriminatoire : il existe de nombreux pays où se saluer sans se toucher est une marque de respect ; doit-on véritablement imposer en France une "bonne manière" de saluer ? ? Et quand bien même la personne refuserait de serrer la main du sexe opposé, il s'agit tout de même d'un contacte corporel, qui peut avoir pour certaines culture une connotation intime ou érotique. Je ne suis pas certain qu'il soit sain que les valeurs françaises aille jusqu'à définir ce qui est érotique. Il est en tout cas intéressant de comparer avec l'arrêt KA et AD où l'Etat belge avait justement voulu déterminer la limite de certaines pratiques sexuelles, ce qu'a refusé la CEDH au nom du droit à l'autodétermination. Je trouve difficile d'applaudir cette autodétermination dans un sens (le sadomasochisme) et de la refuser dans l'autre (un puritanisme poussé au point d'un refus de tout contact avec le sexe opposé).
    3) Enfin, je trouve particulièrement dérangeant de refuser à une femme la nationalité française en raison de sa soumission. Je ne pense pas que la lutte pour l'égalité des femmes et leur émancipation doive passer par les sanctionner elles. Et le législateur français semble par exemple l'avoir compris en dépénalisant les prostituées et en pénalisant à la place les clients de la prostitution. Une femme qui se ferait refuser l'accompagnement d'une sortie scolaire parce que voilée, ou qui se ferait refuser l'acquisition de la nationalité parce que soumise, c'est faire payer à la victime le crime d'en être une.
    A force de trop vouloir imposer une manière d'être conforme, nous y perdrons nos libertés. Nous y perdrons aussi l'égalité : serait-ce trop demander de laisser aux musulmans la même liberté sexuelle qu'aux sadomasochistes et aux prostituées ?

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