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« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.
samedi 15 octobre 2016
Le Palais Royal communique
lundi 10 octobre 2016
La République numérique nous appelle
Des principes libéraux
La neutralité du net s'accompagne, logiquement, d'une interdiction faite aux fournisseurs d'accès d'interrompre la ligne de "toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières". Semblable à ce qui existe en matière d'accès au téléphone ou à l'électricité, cette règle n'interdit cependant pas de réduire le débit dès lors que l'accès demeure fonctionnel.
Le renforcement des pouvoirs de la CNIL
D'après Antoine Gros. Figure allégorique de la République. 1848 |
Une protection modeste des droits individuels
jeudi 6 octobre 2016
L'impartialité de la Cour des comptes devant la Cour européenne des droits de l'homme
Un faux nez de l'administration
Une très longue procédure
Impartialité subjective ou objective
Le premier critère peut être qualifié de subjectif, parce qu'il consiste à pénétrer dans la psychologie du juge, à rechercher s'il désirait favoriser un plaideur ou nuire à un justiciable. Dans ce cas, l'impartialité est présumée, jusqu'à preuve du contraire (CEDH, 1er octobre 1982, Piersack c. Belgique). Dans le cas présent, la question de l'impartialité subjective ne se pose pas, et rien dans la procédure ne laisse entrevoir une volonté délibérée de l'un ou l'autre membre de la Cour des comptes de nuire au requérant.
C'est donc le critère objectif qui est invoqué, et il s'agit cette fois de contrôler l'organisation même de l'institution. La Cour des comptes ne doit pas seulement être impartiale, elle doit apparaître impartiale. La CEDH affirme ainsi, dans une jurisprudence constante et notamment dans son arrêt Morice c. France de 2015 : "En la matière, même les apparences peuvent revêtir de l'importance. Il y va de la confiance que les tribunaux d'une société démocratique se doivent d'inspirer aux justiciables, à commencer par les parties à la procédure". Il appartient donc à la Cour européenne d'évaluer si les craintes du requérant sont, ou non, justifiées.
En l'espèce, aucun membre de la Cour des comptes chargé de contrôler la commune de Noisy-le-Grand n'a participé à la juridiction de jugement. La seule question posée est donc celle de savoir si les termes du rapport public peuvent être considérés comme un "préjugement".
Le Conseil d'Etat français, intervenant dans ses deux arrêts sur l'affaire le 30 décembre 2003, puis le 21 mars 2011, a rendu deux décisions négatives sur ce point. Comme souvent lorsqu'il est invité à se prononcer sur le principe d'impartialité, il procède par affirmation. A ses yeux, le fait que le rapport public de la Cour de comptes évoque l'existence d'opérations de gestion de fait "ne révèle aucun préjugement de l'appréciation qu'il incombe à la Cour de porter, une fois le périmètre de la gestion définitivement fixé, au stade la fixation de la ligne de compte (...)".
Le contrôle, tel que le Conseil d'Etat devrait l'exercer
La CEDH, quant à elle, exerce un contrôle beaucoup plus approfondi, montrant ainsi, en creux, au Conseil d'Etat celui qu'il devrait exercer. Elle observe que le rapport de la Cour des comptes envisageait l'affaire dans son ensemble, sans distinguer entre la qualification de gestion de fait et l'évaluation des sommes concernées. L'association est mentionnée ainsi que les différentes "primes" qu'elle versait, notamment une joyeuse "prime de libéralité" extrêmement bien nommée. Elle mentionnait des chiffres et visait même directement le requérant sans le nommer, mais il pouvait facilement être reconnu par les fonctions qu'il exerçait. Enfin, le rapport invoquait les "conséquences très dommageables" de telles pratiques, portant ainsi une appréciation sur la gravité des faits et l'ampleur des sommes en cause. De tous ces éléments, la CEDH déduit que le requérant était fondé à craindre un défaut d'impartialité objective.
Reste à s'interroger sur les conséquences d'une telle décision. On ne doute pas que, du côté de l'administration français, on minimisera sa portée. L'arrêt du Conseil d'Etat rendu le 10 mai 2004 n'affirme-t-il pas implicitement que le principe d'impartialité pourrait être violé si la Cour des comptes dans son rapport public "portait une appréciation sur la gravité des faits et l'imputation personnelle des responsabilités" ? Le Conseil d'Etat se donne ainsi le beau rôle. Il affirme qu'il peut sanctionner le défaut d'impartialité, qu'il sait le faire, mais qu'il ne veut pas la faire. En l'espèce, la formule ne manque pas d'hypocrisie, dès lors que l'intéressé peut facilement être identifié dans le rapport.
D'une manière générale, l'appréciation du principe d'impartialité par la juridiction administrative est désormais fortement mise en question par le droit européen. D'une manière générale, le Conseil d'Etat a tendance à rejeter l'idée même de l'impartialité objective pour s'en tenir à l'impartialité subjective. Il en fait la démonstration, lorsqu'il a apprécié la légalité d'un recours contre une sanction disciplinaire, alors que le même fonctionnaire avait décidé de retirer ses fonctions au requérant, nommé son successeur, rédigé le rapport de saisine de l'instance disciplinaire, avant de présider lui-même le conseil de discipline (CE, 13 novembre 2013). Pour le Conseil d'Etat, tout cela était parfaitement impartial, dès lors que les membres du conseil de discipline n'avaient pas tenu de propos déplacés sur la culpabilité de l'intéressé. S'il persévère dans cette jurisprudence, il ne fait guère de doute que la Cour européenne sera appelée à intervenir pour lui rappeler les dures réalités de l'impartialité objective.
Sur le principe d'impartialité : Chapitre 4 Section 1, § 1 du manuel de libertés publiques sur internet.
dimanche 2 octobre 2016
La vie d'Adèle devant le Conseil d'Etat : du sexe simulé au sexe réaliste
Une police administrative
Le sexe simulé, ou pas
Le sexe réaliste, ou pas
vendredi 30 septembre 2016
Les invitations de LLC : La liberté de presse au XXIè siècle
JOURNEE DES LIBERTES
LA LIBERTE DE PRESSE AU XXIÈ SIÈCLE
mardi 27 septembre 2016
Transaction pénale : Vers l'annulation du décret de 2015
Une nouvelle forme de transaction pénale
Une jurisprudence bien établie
Observons d'emblée que la transaction pénale contestée dans la présente QPC n'est pas la première du genre. Qu'il s'agisse du classement sous condition et médiation pénale, de la composition pénale, de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, voire de l'amende forfaitaire utilisée dans de nombreux domaines, la formule est solidement ancrée dans notre système juridique et a suscité plusieurs décisions du Conseil constitutionnel.
Depuis sa décision du 30 mars 2006, il la considère conforme à la Constitution, à la condition que soient respectées deux conditions cumulatives. En premier lieu, sa mise en oeuvre est subordonnée à l'accord de la personne mise en cause, assistée d'un avocat. En second lieu, la peine proposée ne doit avoir aucun caractère exécutoire en soi, l'intéressé pouvant refuser l'offre qui lui est faite. Cette double condition a ensuite été confirmée par la décision du 26 septembre 2014 rendue à propos de la transaction pénale en matière environnementale. Dans la décision du 23 septembre 2016, le Conseil s'attache donc à examiner ces deux éléments.
Desperate Housewives. Marc Cherry. Saison 6 épisode 9. 2009. |
L'absence de caractère exécutoire
La précision est importante, car le Conseil constitutionnel offre ainsi sur un plateau un cas d'annulation du décret d'application du 13 octobre 2015. En effet, celui mentionne que "la consignation vaut paiement de l'amende transactionnelle si la transaction est homologuée". Ajoutant ainsi une disposition qui ne figure pas dans la loi, le décret risque d'autant plus d'être annulé par le Conseil d'Etat que nul n'ignore que l'incompétence est un moyen d'ordre public.
Les droits de la défense
Les requérants invoquent ensuite la violation des droits de la défense, dans l'hypothèse où la transaction peut être proposée à la personne mise en cause durant sa garde à vue. Or, le droit positif pose un cadre très strict à l'intervention de l'avocat durant la garde à vue, celui ne pouvant réellement s'entretenir avec son client qu'à sa première heure et au moment de son éventuel renouvellement, pour trente minutes (art. 63-4 cpp). Si la proposition de transaction est faite après ces entretiens, le client n'est donc pas en mesure d'en discuter avec son conseil.
En l'espèce, le Conseil ne peut pas annuler une disposition législative qui n'existe pas, la loi ne précisant pas le moment où la proposition de transaction doit intervenir. Il formule donc une réserve d'interprétation, interdisant "qu'une transaction soit conclue sans que la personne suspectée d'avoir commis une infraction ait été informée de son droit à être assistée de son avocat avant d'accepter la proposition qui lui est faite, y compris si celle-ci intervient pendant qu'elle est placée en garde à vue".
Là encore, le Conseil met le pouvoir réglementaire en porte-à-faux. En effet, le décret du 13 octobre 2015 voulant, sans doute avec la meilleure volonté du monde, éviter toute atteinte au droit de la défense, a purement et simplement interdit toute proposition de transaction pénale pendant la garde à vue. Or le législateur ne l'interdit pas, et c'est ce que fait subtilement observer le Conseil constitutionnel, offrant à nouveau un cas d'incompétence au Conseil d'Etat.
L'incompétence négative
Le Conseil ne se borne tout de même pas à offrir des cas d'annulation du décret d'application. Il déclare fondé le grief reposant sur l'incompétence négative du législateur, dans la mesure où ce dernier ne fixe pas avec précision le champ d'application de la nouvelle transaction pénale. Il renvoie en effet au pouvoir réglementaire le soin de fixer le montant de la valeur des objets volés en-dessous duquel la transaction peut-être proposée. Pour le Conseil, le refus de fixer ce plafond emporte une violation de l'article 34 de la Constitution, dès lors que seul le législateur est compétent pour définir les règles gouvernant l'extinction de l'action publique et le champ d'application d'une procédure pénale.
Cette censure n'est guère surprenante. Le Conseil constitutionnel semble directement s'inspirer de l'arrêt France Nature Environnement rendu par l'Assemblée du Conseil d'Etat le juillet 2006. Celui-ci avait alors affirmé "qu'il appartient au législateur, (...) lorsqu'il crée un régime de transaction pénale, de déterminer les règles qui permettent d'en assurer le respect ; qu'au nombre de ces règles figurent le champ d'application de la transaction pénale".
La décision QPC du 23 septembre 2016 révèle, en creux, de graves insuffisances dans la rédaction des textes législatifs et réglementaires. Nul doute que l'annulation pour incompétence négative aurait pu être évitée, tant il était évident que le plafond financier de la transaction conditionnait son champ d'application. Nul doute aussi que la rédaction du décret accumule les cas d'incompétence et que le Conseil constitutionnel se fait un plaisir, peut-être un peu pervers, de les signaler au Conseil d'Etat. La QPC va donc entrainer non pas l'annulation de la loi mais très probablement celle du décret. Un exemple de plus de l'influence considérable de la jurisprudence constitutionnelle sur l'ensemble du système juridique. Pourquoi pas ? Encore faudrait-il réfléchir sérieusement à la composition du Conseil constitutionnel, à l'impartialité de ses membres et à toutes questions qui empêchent aujourd'hui de le considérer comme une vraie juridiction.