« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.


jeudi 24 janvier 2013

Le canard coquin, plumé par la Cour de cassation

Vous souvenez vous de cette affaire qui nous avait fait sourire, durant l'année 2012 ? En février, deux associations catholiques avaient obtenu du tribunal correctionnel de Paris la condamnation du responsable des magasin proche du Centre Pompidou, vendant des sex toys. Or la loi sur la protection de l'enfance du 5 mars 2007 punit d'une peine de deux années d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende le fait de vendre des "objets pornographiques" à moins de deux cents mètres d'un établissement d'enseignement. Il y avait une école religieuse dans ce périmètre, et qui dit école religieuse dit aussi parents d'élèves intraitables sur la moralité et l'intérêt supérieur de l'enfant. Les petits ont le droit et le devoir de manifester avec leurs parents contre le mariage homosexuel, mais ils ne doivent pas entrevoir le bout du bec d'un canard coquin. 

Notre marchand avait tout de même été dispensé de peine, mais il avait dû mettre la clé sous la porte, renvoyer une partie de ses employés, et vendre ses canetons sur internet. Il n'avait cependant pas renoncé au combat judiciaire et avait fait appel, en joignant à son recours une demande de QPC portant précisément sur les dispositions de la loi du 5 mars 2007. Les juges du fond avaient considéré la question sérieuse et l'avaient transmise à la Cour de cassation. Hélas, la Cour, dans une décision du 22 janvier 2013, vient d'opposer une fin de non recevoir au demandeur, écartant ainsi toute possibilité de contrôle de la constitutionnalité de ces dispositions. 

Une décision motivée

La décision peut sembler surprenante, car la Cour de cassation a l'habitude de rendre des décisions très sommairement motivées en matière de QPC. Certains commentateurs l'ont même accusée de ne pas jouer son rôle de filtre et de transmettre au Conseil constitutionnel toutes les QPC. D'autres, encore plus malveillants, insinuaient que l'idée d'encombrer le rôle du Conseil constitutionnel n'était pas pour lui déplaire, puisqu'il s'agissait de témoigner sa désapprobation à l'égard de cette procédure. 

La décision du 22 janvier 2013 montre que ces accusations venimeuses n'étaient pas fondées, ou que cette époque est révolue. La Cour y exerce en effet un contrôle de proportionnalité, en affirmant que les dispositions contestées ne portent pas une atteinte excessive au principe de la liberté d'entreprendre.


Walt Disney. Les neveux de Donald. 1938


Le contrôle de proportionnalité

La lecture de la décision de la Cour de cassation montre que le requérant s'est exclusivement placé sur le fondement de la violation de la liberté d'entreprendre. En effet, condamné par le juge pénal, il s'est contraint à la fermeture, et les trois employés qui travaillaient avec lui ont été licenciés. Il y a donc effectivement atteinte à la liberté d'entreprendre, définie comme le droit d'exercer l'activité de son choix, et par conséquent de créer ou d'acquérir une entreprise. 

Nul ne conteste que la liberté d'entreprendre a valeur constitutionnelle, depuis la décision du 16 janvier 1982 sur les nationalisations, et elle est désormais associée au droit de propriété, (décision du 7 décembre 2000). Comme dans bien d'autres domaines, le Conseil constitutionnel exerce donc un contrôle de proportionnalité, examinant très attentivement si les dispositions législatives contestées portent une atteinte excessive à la liberté d'entreprise. En l'espèce, le requérant pouvait espérer que l'interdiction de vendre les canards coquins à moins de deux cents mètres d'un établissement scolaire serait considérée comme excessive, dès lors qu'elle réduit considérablement les possibilités d'installation de ce type de commerce dans une grande agglomération dotée de nombreuses écoles. 

La Cour de cassation a exercé elle même ce contrôle de proportionnalité, estimant que le but d'intérêt général de protection de l'enfance suffit à justifier une telle interdiction. Pourquoi pas ? Il n'en demeure pas moins que la Cour, en effectuant ce contrôle de proportionnalité, reconnaît, en creux, l'existence d'un problème de constitutionnalité qui aurait largement justifié la transmission de la QPC. En d'autres termes, la lecture de la décision laisse penser que la Cour de cassation se substitue au Conseil constitutionnel. 


Cette décision pour le moins péremptoire laisse de côté un autre moyen d'inconstitutionnalité, reposant sur le défaut de clarté et d'intelligibilité de la loi, principe constitutionnel formulé notamment dans la décision du 7 décembre 2000. La Cour de cassation elle-même, dès une décision du 29 septembre 1999, n'hésitait d'ailleurs pas à annuler une condamnation au motif que "le texte d'incrimination est entaché d'équivoque et d'imprécision". En l'espèce, l'incrimination repose sur la notion d'"objet pornographique", dont on ne connaît pas vraiment la définition. Notre canard coquin est-il un "objet pornographique" ou seulement érotique ? La Cour de cassation refuse manifestement d'exercer l'intégralité du contrôle de constitutionnalité. Nous n'aurons donc jamais la réponse, et notre canard conservera son mystère. 



mardi 22 janvier 2013

L'UE et la liberté d'accès à une information libre et pluraliste

Le groupe de haut-niveau présidé par  Vaira Vike-Freiberga, ancienne Présidente de Lettonie  a remis le 21 janvier à Nelly Kroes, commissaire européenne chargée des nouvelles technologies, un rapport intitulé "Des médias libres et pluralistes pour renforcer la démocratie européenne". Il mérite d'être lu, ne serait-ce que parce qu'il témoigne de l'intérêt nouveau de l'Union européenne pur les libertés publiques, illustré par son adhésion à la Convention européenne des droits de l'homme. Ce rapport s'appuie précisément sur l'article 11 § 2 de la Charte des droits fondamentaux qui impose le respect de la liberté des médias et de leur pluralisme. 

Entre éclatement des législations et concentration financière 

Le rapport repose sur un constat pessimiste. D'une part, un éclatement des législations ne permet guère de développer un véritable standard européen de la liberté des médias. On observe ainsi, et ce n'est qu'un exemple, de grandes disparités dans le droit de la diffamation, utilisé dans certains pays pour garantir la vie privée des personnes, et dans d'autres pour empêcher l'expression des opposants politiques. D'autre part, la concentration des médias conduit souvent à les mettre au service des partis politiques au pouvoir, et à soumettre les journalistes aux puissances financières. Le développement des technologies numériques n'a fait qu'accroître la menace sur le pluralisme, en suscitant une concurrence encore plus grande entre les différents organes de presse, le passage au numérique étant, bien souvent, l'instrument de leur survie. 

Affirmer la compétence de l'UE

Entre l'éclatement des législations et la concentration financière, la réalité du secteur de la presse est donc difficile à appréhender au niveau européen, et l'UE ne dispose pas d'instruments d'action très efficaces. La recommandation essentielle de ce rapport réside donc dans la consécration d'une compétence de l'UE dans ce domaine. L'idée apparaît logique, si l'on considère que la compétence européenne en matière de protection des données a déjà permis l'émergence d'un ensemble de principes protecteurs pour les citoyens, plus protecteurs en tout cas que ceux qui existent en droit américain. Sur un plan plus juridique, cette compétence peut reposer sur les Traités qui garantissent la libre circulation, y compris celle de l'information, ainsi que le droit à une démocratie représentative qui ne peut exister que si le principe de pluralisme est garanti. L'article 11 § 2 de la Charte des droits fondamentaux ne fait que reprendre ce principe.

Cette compétence nouvelle inciterait l'UE à rechercher l'harmonisation des législations des Etats autour de principes communs, notamment le pluralisme. 

Henri de Toulouse Lautrec
Désiré Dihau lisant le journal dans le jardin. 1890


Le droit d'accès à internet, droit d'accès à une information pluraliste

Ce principe de pluralisme guide la réflexion des auteurs du rapport, lorsqu'ils évoquent les médias numériques aujourd'hui de plus en plus présents sur internet. Le libre accès à internet est alors induit par la liberté d'accès à une information pluraliste. Sur ce point, le rapport s'écarte un peu de l'idéologie dominante, largement anglo saxonne, qui prône le principe de "neutralité du net", garantissant l'égalité de traitement de l'ensemble des flux d'information circulant sur internet. Il préfère invoquer, plus simplement, le droit d'accès à une information pluraliste. Pour en garantir le respect, les fournisseurs d'accès doivent offrir un libre accès à internet à tous les internautes, sans aucune discrimination. La neutralité du net n'est donc pas un objectif en soi, mais bien davantage l'instrument du respect de la liberté d'accès à une information pluraliste. 

Observons à ce propos qu'une telle conception du droit d'accès à une information pluraliste, reposant sur le libre accès à internet, paraît bien difficilement compatible avec le droit français. La loi Hadopi n'autorise-t-elle pas une coupure totale de l'accès à internet des personnes poursuivies pour avoir effectué des téléchargements illégaux ? Dans ce cas, le droit d'accès à une information libre et pluraliste semble gravement malmené. 

Bien entendu, ce type de rapport ne saurait totalement échapper à une bonne dose de "langue de bois". Il envisage ainsi toute une série de programmes de travail pour "renforcer les valeurs de liberté et de pluralisme" dans les Etats membres, ou de "codes de conduite" pour développer la transparence dans les médias. Mais au-delà de ce discours convenu, on voit tout de même se dégager une conception européenne de la liberté de presse. Alors que le droit anglo-saxon intègre la liberté d'accès à l'information dans une approche économique fondée sur la libre circulation des biens informationnels, le droit de l'Union européenne semble s'engager dans une approche plus individualiste. 

Reste évidemment à s'interroger sur les suites d'un tel rapport. Remis à la commissaire en charge des nouvelles technologies, il devra sans doute être étudié par d'autres commissaires, avant que la Commission ne donne sa position sur cette question. Si jamais ce rapport parvient à la Commission.



dimanche 20 janvier 2013

Liberté religieuse : un avertissement de la Cour européenne ?

L'arrêt Eweida et a. c. Royaume Uni, rendu par la Cour européenne le 15 janvier 2013 suscite bon nombre de commentaires, surtout en France. Il est en effet relatif à la liberté de religion, actuellement mise en avant par ceux qui estiment que les convictions religieuses doivent sortir de l'espace de la vie privée pour pénétrer la vie publique et guider le législateur. 

En l'espèce, et il convient de ne pas l'oublier, les requérants sont quatre citoyens britanniques qui se présentent comme "Chrétiens pratiquants". Deux femmes, Mesdames Eweida et Chaplin, l'une est employée par British Airways et l'autre infirmière gériatrique,  se plaignent de ne pas avoir l'autorisation de porter de porter de manière visible et pendant leur travail une croix autour de leur cou. Les deux autres, Mme Ladele et M. Mc Farlane, estiment que leurs convictions religieuses leur interdisent toute action qui aboutirait à reconnaître l'homosexualité. Or, Mme Ladele est officier d'état civil, et doit célébrer des cérémonies de "partenariat civil" entre des couples homosexuels. Quant à M. Mac Farlane, il exerce les fonctions de conseiller dans un organisme britannique, Relate, qui offre des services de conseil conjugal et de sexothérapie. 

Les quatre requérants contestent les diverses poursuites disciplinaires dont ils ont fait l'objet, mais il faut reconnaître que les situations sont très différentes. Dans les deux premiers cas, les requérantes revendiquent le port ostensible de signes religieux pendant l'exercice de leurs fonctions. Dans les deux autres, des agents publics invoquent leurs convictions pour refuser d'assumer une partie de leur service. Tous en tout cas s'appuient sur les dispositions combinées des articles 9 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme qui consacrent la liberté religieuse et le principe de non-discrimination. 

Liberté religieuse, et ingérence de l'Etat

La Cour commence par rappeler que "la liberté de pensée, de conscience et de religion est l'un des fondements d'une société démocratique". Elle est aussi indispensable aux croyants qui peuvent affirmer leur identité, qu'aux athées et  agnostiques, puisqu'elle constitue un élément du pluralisme de la société. Reprenant les deux alinéas de l'article 9, la Cour fait observer que la liberté religieuse  a une double dimension, à la fois liberté de la conscience la plus intime de l'individu, mais aussi liberté de manifester sa religion collectivement, par l'exercice du culte ou l'accomplissement des rites. Comme pratiquement toutes les libertés consacrées par la Convention européenne, la liberté de religion peut cependant donner lieu à des restrictions, lorsque l'ingérence étatique constitue une "mesure nécessaire dans une société démocratique à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publique, ou à la protection des droits et libertés d'autrui". 

De cette formulation, certains auteurs déduisent le caractère "relatif" de la liberté religieuse. A dire vrai, elle n'est ni plus ni moins relative que les autres libertés. Le droit européen, exactement comme le droit français, considère en effet que les libertés s'exercent dans un cadre juridique défini par la loi de l'Etat. Celle-ci peut donc "s'ingérer" dans l'exercice d'une liberté, dans un but d'ordre public ou pour garantir le respect des droits des tiers. 

La Cour européenne constate, dans les deux hypothèses, que les autorités britanniques sont effectivement à l'origine d'une "ingérence" dans la liberté religieuse, ce qui n'implique aucune appréciation sur le bien-fondé de cette ingérence. C'est seulement après avoir constaté l'existence de cette ingérence que la Cour s'intéresse à sa proportionnalité par rapport aux objectifs poursuivis par la législation. Sur ce point, la décision de la Cour n'a rien de novateur. Elle ne consacre pas une quelconque "relativité" de la liberté religieuse, notion qui n'existe d'ailleurs pas en droit européen, et pas davantage en droit interne. Elle se borne à mettre en oeuvre la célèbre jurisprudence Sunday Times c. Royaume Uni adoptée le 26 novembre 1991, il y vingt et un ans, et qui consacre ce contrôle de proportionnalité.

Dans l'affaire Eweida, la Cour effectue exerce ainsi son contrôle de proportionnalité sur chacune des quatre requêtes. Elle rend  donc un arrêt très nuancé, puisqu'elle traite différemment des situations différentes.


Madonna et le port de signes religieux

Le port des signes religieux

Dans le cas de deux requérantes qui estiment impossible de travailler sans porter une symbole religieux, la Cour rend une décision conforme à sa jurisprudence antérieure. Elle estime en effet que les Etats disposent d'une large "marge d'appréciation" pour réglementer le port des signes religieux. A propos d'une législation turque qui interdisait le port du foulard islamique dans les universités, la Cour observe ainsi que les autorités turques font effectivement ingérence dans la liberté religieuse. Mais cette ingérence a une base légale et peut être considérée comme "nécessaire dans une société démocratique" (CEDH, GC, 10 novembre 2005, Leyla Sahin c. Turquie). Rien n'interdit donc aux Etats de légiférer dans ce domaine, et d'interdire aussi bien le port du voile islamique que celui d'une croix.

En revanche, lorsqu'il n'existe aucune législation, la Cour se montre évidemment plus souple dans son contrôle de proportionnalité. Dans l'arrêt Lautsi du 18 mars 2011, elle considère que la présence de crucifix dans les écoles publiques italiennes ne porte pas une atteinte excessive à la liberté de conscience des élèves, dès lors que la loi italienne ne l'interdit pas. Le Royaume Uni est dans une  situation comparable, et n'a pas adopté de législation interdisant le port de signes religieux sur les lieux de travail.  La Cour observe dès lors que la contrainte imposée à Mesdames Eweida et Chaplin n'a pas de fondement légal, mais repose uniquement sur une décision du chef de service. La Cour se livre donc au contrôle de proportionnalité, et, de nouveau, rend une décision différente dans chaque cas.

Dans le cas de Madame Eweida, la Cour considère que les tribunaux britanniques n'ont pas fait une juste appréciation des intérêts en présence. S'il est légitime pour l'entreprise de vouloir véhiculer une certaine image de marque laïque, notamment en imposant le port d'un uniforme, le refus total de tout signe religieux apparaît excessif, d'autant que, après les faits et confrontée à d'autres recours, l'entreprise a finalement changé son code vestimentaire pour autoriser le port de signes religieux discrets. Dans le cas de Mme Chaplin, en revanche, la Cour observe que l'interdiction repose sur un motif d'intérêt général, dès lors qu'un patient peut s'accrocher à ce bijou et provoquer des blessures. En l'espèce, la Cour considère que l'employeur a pris une décision proportionnée aux intérêts en cause, et que les juges britanniques ont confirmé à juste titre cette appréciation.

Homosexualité et non-discrimination

Dans le cas de Mme Ladele et de M. Mc Farlane, la Cour se montre plus rigoureuse. Elle rappelle que toute différence de traitement en raison de l'orientation sexuelle ne peut se justifier que par des motifs particulièrement solides (Par exemple : CEDH, Schalk et Kopf C. Autriche, 2004). Les sanctions prises contre les deux requérants apparaissent alors à la Cour tout à fait proportionnées par rapport à l'objectif de non discrimination poursuivi par les autorités publiques et dont le respect s'impose à tous les agents publics. La requête est donc fermement rejetée.

Il est tout de même intéressant de noter une petite phrase, glissée par la Cour dans la rédaction de l'arrêt.
Conformément à sa jurisprudence antérieure, elle affirme que les Etats jouissent d'une grande d'appréciation pour organiser dans leur ordre interne la situation des couples homosexuelles. Mais elle ajoute immédiatement que "les couples homosexuels sont globalement dans une situation identique à celle des couples hétérosexuels au regard de leur reconnaissance juridique et de la protection de leur relation". Cette formule n'a sans doute pas été introduite par hasard dans la décision et elle sonne un peu comme un avertissement pour les Etats membres, et pour la France en particulier. La liberté religieuse ne saurait être invoquée pour justifier une législation qui maintiendrait des discriminations entre les couples, en fonction de leur orientation sexuelle. A bon entendeur..


jeudi 17 janvier 2013

Liberté de manifestation : qui paie les dégâts ?

Le collectif  "La manif pour tous" fait savoir aujourd'hui qu'il refuse de payer la remise en état de la pelouse du Champs de Mars durement éprouvée par le passage de milliers (selon la police) ou de millions (selon les organisateurs) de pieds. La mairie de Paris évalue les dégâts à 100 000 € et entend bien trouver un patrimoine responsable. Les organisateurs, de leur côté, considèrent que les cortèges étaient dûment autorisés par la préfecture de police et qu'il appartient donc à l'Etat ou à la mairie de Paris d'assumer cette charge financière. 

A dire vrai, le communiqué de ce collectif, dont on ne connaît guère que la porte-parole, Frigide Barjot, présente surtout l'intérêt d'affirmer clairement sa responsabilité dans l'organisation de la manifestation. Sur ce point, la mairie de Paris a donc déjà obtenu un résultat non négligeable, car il est parfois difficile d'identifier les responsables juridiques d'un rassemblement. Certains sont des groupements de circonstance dépourvus de personnalité morale, et qui disparaissent après la manifestation. D'autres sont constitués de différents groupements, parfois fort nombreux, qui refusent d'assumer une responsabilité collective. Par son communiqué, Frigide Barjot et le Collectif assument la responsabilité juridique de l'attroupement sur le Champs de Mars. Il reste à définir s'ils sont aussi financièrement responsables des dommages causés à ce maudit gazon. 

La responsabilité du fait des attroupements ? 

Peut on envisager la mise en oeuvre du régime législatif de responsabilité du fait des attroupements ? Certains auteurs le font remonter à un Edit de Clotaire II qui, en 595, pose le principe d'une responsabilité collective des habitants en cas de vols et rapines commis par des inconnus sur le territoire de la paroisse. Cette responsabilité collective reparaît pendant la Révolution, pour réprimer l'agitation royaliste : "Si la majorité des habitants de la commune prend part à l'émeute, il est juste qu'ils payent ; si c'est la minorité, il encore juste que tous payent parce que la majorité est punie de n'avoir pas arrêté l'émeute" (archives parlementaires, séance du 23 février 1790). 

Peu à peu cependant, on s'aperçoit que les habitants ne sont pas toujours solvables et qu'ils ne peuvent assumer une charge financière trop lourde, même collectivement. La loi municipale du 8 avril 1884 puis celle du 16 avril 1914 vont donc transférer la responsabilité collective des habitants sur celle de la commune, et enfin sur l'Etat avec une loi du 7 janvier 1983. La compétence contentieuse est alors  transférée du juge judiciaire au juge administratif par la loi du 29 janvier 1986. 



Charles Trenet. Le jardin extraordinaire

L'Etat est-il donc civilement responsable des dommages causés à la pelouse du Champs de Mars ? Pas sur le fondement de la loi du 7 janvier 1983, dont les dispositions, aujourd'hui codifiées dans l'article L 2216-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT), mentionnent que "l'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens". S'il y a bien un rassemblement, s'il y a bien un dommage causé à un bien, en l'occurrence le domaine public, les deux autres conditions d'engagement de cette responsabilité sont absentes. Il n'y a évidemment pas "crime ou délit", car le fait de piétiner une pelouse peut, au grand maximum, s'analyser comme une contravention de grande voirie, puisqu'il y atteinte au domaine public. Une contravention, ce n'est donc ni un crime, ni un délit. De même, les manifestants n'ont pas fait preuve de "violence ou de force ouverte", seulement d'un joyeux mépris pour l'environnement.

De toute évidence, la loi de 1983 n'est pas applicable en l'espèce, ce qui impose un retour au droit commun de la responsabilité. Le patrimoine responsable est donc bel et bien celui des organisateurs de la manifestation.

Un partage de responsabilité ?

Cela ne signifie pas, évidemment, qu'ils seront condamnés à réparer l'intégralité du préjudice causé à la ville de Paris. Chacun sait que la liberté de manifester s'exercer dans le cadre d'un régime de déclaration préalable, depuis un décret-loi du 23 octobre 1935. A Paris, les organisateurs doivent déclarer au préfet de police leur intention de manifester, et cette déclaration donne lieu à une négociation sur le jour, l'itinéraire, les précautions à prendre en matière de service d'ordre etc etc. Nul doute que pour une manifestation présentée par ses organisateurs comme devant déplacer beaucoup de monde, ces discussions ont dû être substantielles.

On s'étonne évidemment que ces organisateurs qui se présentaient comme des maîtres de la logistique et du transport en bus, aient oublié qu'ils installaient les manifestants sur le domaine public de la ville de Paris. On s'étonne encore davantage que les autorités de police n'aient pas eu l'idée d'interdire tout simplement l'accès au Champs de Mars et demandé la dispersion dans un endroit moins exposé, par exemple l'Esplanade des droits de l'homme ou la Place du Trocadéro, puisque nos manifestants préféraient défiler à Paris-Ouest plutôt qu'arpenter Bastille-République. Souvenons nous qu'il n'y a pas si longtemps, le 16 décembre 2012, la manifestation des partisans du mariage pour tous, partie de la Bastille, s'est tranquillement dispersée devant les grilles du jardin du Luxembourg, sans y pénétrer. 

Dans ces conditions, un éventuel contentieux conduirait sans doute à la condamnation des organisateurs de la manifestation, qui pourraient ensuite se retourner contre l'Etat pour obtenir un remboursement partiel de leur dette. A moins que tout cela se règle à l'amiable, en espérant que les manifestants sauront désormais regarder où ils posent les pieds. 

lundi 14 janvier 2013

Mariage pour tous et référendum

Les manifestants hostiles au mariage pour tous réclament, à cor et surtout à cris, l'organisation d'un référendum pour soumettre la loi au corps électoral. On peut évidemment comprendre cette revendication de la part d'une partie de la population qui supporte mal d'avoir perdu successivement les élections présidentielles et les élections législatives, et qui s'aperçoit que la démocratie représentative ne permet pas à la minorité d'imposer ses choix à la majorité. Reste donc la démocratie directe, et la démarche en faveur d'un référendum populaire.

Hélas, le référendum dans ce domaine est constitutionnellement impossible. Et comme il est bien connu que l'on n'est jamais trahi que par les siens, cette impossibilité est le résultat d'une politique de l'ancienne majorité, qui a refusé d'étendre aux libertés le champ du référendum de l'article 11, et qui a volontairement empêché la mise en place du référendum d'initiative populaire. 

Le champ du référendum

Revenons au texte de l'article 11 : "Le Président de la République (...) peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à la ratification d'un traité (...)".

Il n'est évidemment pas question de considérer le mariage comme un élément de l'organisation des pouvoirs publics, formule qui renvoie aux pouvoirs constitués. Il n'est pas davantage possible de la considérer comme un service public car il ne vise pas à fournir des prestations, dans un but d'intérêt général. 

Le mariage ne relève pas davantage de la "politique économique et sociale" de la nation. Le droit positif définit le mariage comme une liberté publique, c'est à dire une liberté garantie et protégée par la droit. L’article 12 de la Convention européenne énonce que « à partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit ». Dans sa décision du 13 août 1993, le Conseil constitutionnel constitutionnalise quant à lui « le principe de la liberté du mariage qui est une des composantes de la liberté individuelle ». Par la suite, dans sa décision du 20 novembre 2003, il précise que la liberté du mariage se rattache également à la "liberté personnelle", découlant des articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

On conviendra qu'il est bien difficile de contester la définition du mariage donnée par le Conseil constitutionnel, surtout depuis que cette noble institution a sanctionné la disposition de la loi de finances qui prévoyait le prélèvement à 75 % pour les revenus les plus élevés ?


Voutch


Observons d'emblée que si le Constituant dresse une liste limitative des domaines susceptibles de donner lieu à référendum, c'est précisément parce qu'il n'entend pas l'ouvrir à toutes les revendications. Cette liste a d'ailleurs suscité bon nombre de réflexions et de révisions depuis 1958. Il a, en effet, été question d'élargir le référendum au domaine des libertés, et c'était l'objet d'un projet de loi constitutionnelle initié par François Mitterrand en juillet 1984. Adopté par l'Assemblée nationale, le projet a finalement été rejeté par le Sénat. A l'époque, il s'agissait, on le sait, d'un Sénat de droite. Plus tard, le projet de révision engagé en 1992, issu des travaux de la Commission Vedel, propose, à peu près dans les mêmes termes, d'élargir le champ du référendum aux "garanties fondamentales des libertés publiques". Hélas, le projet sera finalement enterré, à la suite de la victoire de la droite aux législatives de 1993.

Depuis cette date, il n'a jamais plus été question d'élargir le champ du référendum aux libertés publiques. La révision du 4 août 1995 a certes introduit la possibilité d'y recourir pour "les réformes relatives à la politique et sociale", mais le rapport Larché affirme alors clairement la volonté de ne pas revenir à la formulation de 1984, et donc d'exclure le référendum en matière de libertés. En 2008, lorsque l'administration Sarkozy propose à son tour une révision, c'est seulement pour ajouter la politique "environnementale" dans le champ du référendum. En d'autres termes, la droite a eu deux fois la possibilité d'élargir le champ du référendum aux libertés, et deux fois elle s'y est refusée.

Le référendum d'initiative partagée

Reste évidemment la révision Sarkozy de 2008 : le référendum d'initiative partagée. Désormais, la Constitution permet un référendum "organisé à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales".  Contrairement à ce qui a été affirmé, il ne s'agit pas d'un référendum d'initiative populaire, mais plutôt d'une initiative parlementaire, l'aval du peuple n'étant qu'une condition supplémentaire de sa mise en oeuvre. Si on considère la réforme du mariage, on peut imagine que l'UMP retrouve un peu d'unité pour qu'un cinquième des membres du parlement propose ce référendum. Quand au dixième du corps électoral, ce chiffre représente environ 4 500 000 électeurs, un chiffre dérisoire si l'on considère le nombre des manifestants hostiles au mariage pour tous, nombre des manifestants évalués par les organisateurs évidemment.

Hélas toujours, le gouvernement de François Fillon a mystérieusement tardé à déposer le projet de loi organique indispensable à la mise en oeuvre du référendum d'initiative partagée. C'est sans doute un simple oubli, et non pas une manoeuvre pour empêcher une réforme qui permettait à l'opposition, à l'époque de gauche, de susciter un référendum. Quoi qu'il en soit, après la révision de 2008, le projet de loi a été déposé en décembre 2010, pour parvenir en discussion en décembre 2011, et être voté en première lecture le 10 janvier 2012, soit trois années après la révision. A ce jour, il n'est toujours pas passé en première lecture au Sénat, et le gouvernement actuel n'est évidemment pas pressé de faire entrer en vigueur une révision qu'il n'a pas votée.

Nos manifestants ne sont guère fondés à demander un référendum. Ceux là même qui défilaient ont refusé à la fois l'extension du référendum aux libertés et la mise en oeuvre de l'initiative partagée. La vie est cruelle. Heureusement, il reste la liberté de manifester, élément essentiel de la liberté d'expression d'une opposition, qui doit s'accepter comme telle.

Gageons au surplus que, si la loi est votée, elle sera soumise par les parlementaires UMP, ceux-là mêmes qui réclament un référendum, au Conseil constitutionnel. On fera flèche de tout bois, sans souci de la contradiction, puisque à l'appel au peuple on substituera le recours à un collège de grands prêtres dont les liens avec le peuple sont des plus ténus. Le Conseil pourrait-il servir de champ d'écho au conseil des évêques dans une communion des augures ? Rien n'est impossible, mais on sera alors bien loin de la démocratie, aussi bien directe que représentative.

Pour finir, une anecdote historique qui illustre les variations de l’Eglise sur la nécessité pour un enfant d’avoir un père et une mère. Le Roi très Chrétien, Louis XIV, a engendré un nombre respectable d’enfants adultérins. Certains d’entre eux ont été légitimés, « sans nommer la mère » et avec droit de succession à la Couronne, ce contre quoi Saint Simon s’étouffait d’indignation. Cette particularité juridique, des enfants sans mère, a été bénie par l’Eglise du temps, comme acceptée par les juristes de l’époque. Ces enfants ont mené ensuite une vie princière des plus normales. Le Roi des Français, Louis-Philippe Ier, était l’un de leurs descendants, et toute la branche d’Orléans avec lui. L’Eglise de France était alors plus complaisante avec le législateur…

dimanche 13 janvier 2013

Non bis in idem, un principe constitutionnel autonome ?

Le Conseil constitutionnel est actuellement saisi d'une QPC 2012-289 portant sur le principe "Non bis in idem". Déjà connu du droit romain, il signifie tout simplement que nul ne peut être poursuivi ni condamné deux fois pour les mêmes faits. Cette règle figure dans l'article 368 du code de procédure pénale, le Protocole n° 7 de la Convention européenne des droits de l'homme (art. 4), l'article 15 § 7 du Pacte international sur les droits civils et politiques et enfin l'article 50 de la Charte européenne des droits fondamentaux. On le constate, tous ces textes font du principe "Non bis in idem" une obligation conventionnelle ou législative, limitée au cadre strict du droit pénal. 

Deux procédures disciplinaires

La QPC posée au Conseil constitutionnel porte cette fois sur la procédure disciplinaire. Dans sa décision du 7 novembre 2012, le Conseil d'Etat pose en effet la question de la constitutionnalité de l'article L 145-2 du code de la sécurité sociale. Celui ci prévoit un système assez complexe de cumul de poursuites disciplinaires contre les médecins. Ces derniers sont soumis à deux types de règles. D'une part, adhérents à un Ordre professionnel, il doivent respecter des normes déontologiques dont la violation peut conduire à une sanction prononcée par la Chambre disciplinaire de l'Ordre. D'autre part, prescripteurs de dépenses publiques, ils sont soumis à d'autres règles, dans l'intérêt cette fois de la sécurité sociale. Les sanctions sont alors prononcées par les Sections des assurances sociales, considérées comme des juridictions de contrôle technique prononçant également des sanctions disciplinaires. 

Le requérant, M. Laurent A., est accusé d'avoir accompli des actes chirurgicaux en dehors de sa spécialité. Il a donc été condamné à une interdiction d'exercer pendant deux ans prononcée par la Chambre disciplinaire de l'Ordre des médecins, puis à une interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant trois ans, par la Section des assurances sociales. Conformément aux dispositions de l'article L 145-2 css., c'est finalement la sanction la plus forte qui a été mise à exécution, soit une peine de trois années d'interdiction de soins aux assurés sociaux. Une procédure est donc mise en oeuvre pour éviter le cumul des peines, mais pas celui des poursuites.


Knock. Guy Lefranc. 1951. Louis Jouvet et Pierre Renoir

Les règles de cumul

Le droit positif n'exclut pas les doubles poursuites, lorsqu'il s'agit de cumuler des poursuites disciplinaires, administratives ou fiscales avec une action strictement pénale. Depuis le célèbre arrêt du Tribunal des conflits Thépaz du 14 janvier 1935, on sait que le comportement d'un fonctionnaire peut constituer à la fois une faute pénale et une faute de service, et susciter à la fois des poursuites pénales et disciplinaires. Dans une décision du 8 juillet 2012, la Cour de cassation refuse ainsi la transmission au Conseil d'une QPC portant sur les dispositions qui autorisent l'Autorité des marchés financiers (AMF) à engager des poursuites administratives susceptibles de se cumuler avec des poursuites pénales. La Cour considère en effet que le principe "Non bis in idem" ne s'applique pas, dès lors qu'il s'agit de deux procédures de nature différente. 

Certes, mais en l'espèce, notre médecin fait l'objet de deux actions de nature disciplinaire. C'est précisément ce qui a justifié, cette fois, la transmission de la QPC au Conseil constitutionnel. 

Il faut en convenir, l'état du droit positif n'est guère favorable au requérant. Le Conseil d'Etat estime certes qu'un fonctionnaire ou un agent contractuel ne peut être sanctionné qu'une seule fois sur le plan disciplinaire. Dans un arrêt du 4 mars 1988, il a ainsi déclaré illégale la décision d'un maire révoquant un ouvrier d'entretien de la commune qui s'était battu avec un habitant, car une première sanction de mise à pied de cinq jours avait déjà été prise à son encontre. Dans l'affaire Laurent A. cependant, les deux procédures sont bien distinctes et les sanctions ne sont pas prononcées par les mêmes autorités.

Vers l'autonomie du principe "Non bis in idem" ? 

Il n'en demeure pas moins que si le Conseil décidait de faire de "Non bis in idem", un principe clairement constitutionnel, il pourrait être considéré comme s'appliquant à l'ensemble des procédures, qu'elles soient disciplinaires ou pénales. Une telle évolution irait évidemment dans le sens d'une jurisprudence qui tend à définir un certain nombre de garanties fondamentales de droit processuel, applicables à toutes les procédures pouvant s'analyser comme des sanctions.

Pour le moment, le Conseil constitutionnel n'a été appelé à se prononcer qu'en matière pénale, et il précise, dans sa décision du 25 février 2010, que le législateur peut prévoir que certains faits peuvent donner lieu à différentes qualifications. A cette occasion, il se réfère à "la règle Non bis in idem", sans préciser sa valeur juridique, et même sans réellement la dissocier du principe de nécessité de la peine, lui-même rattaché à l'article 8 de la Déclaration de 1789.

La QPC actuellement soumise au Conseil constitutionnel lui offre l'occasion de consacrer l'autonomie de la règle "Non bis in idem" et d'affirmer sa valeur constitutionnelle. Il peut le faire, sans pour autant nécessairement donner satisfaction au requérant, ce qui est sans doute la voie la plus simple pour réaliser une évolution jurisprudentielle.

Mais il pourrait aussi estimer que la double procédure dont le requérant a fait l'objet porte atteinte au principe "Non bis in idem", non pas en matière de peines, mais en matière de poursuites. En pratique, on ne voit d'ailleurs pas ce qui interdirait la mise en oeuvre par l'Ordre des médecins d'une procédure disciplinaire unique, à laquelle pourrait se joindre les organismes sociaux. Quant aux sanctions, l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux prononcée en matière de sécurité sociale ressemble étrangement à l'interdiction d'exercer prononcée par l'Ordre. Tous les patients, ou presque, ne sont-ils pas des assurés sociaux ?