« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.


mardi 16 juillet 2013

Diffamation et droit à l'information

L'arrêt Wegrzynowski et Smolczewski c. Pologne rendu le 16 juillet 2013 par la Cour européenne des droits de l'homme permet de préciser l'articulation entre la diffamation et le droit à l'information. En mai 2002, il y a plus de onze ans, deux avocats polonais de Katowice ont eu quelques problèmes avec le journal Rzeczpospolita. Celui-ci a publié un article affirmant qu'ils ont fait fortune en aidant des hommes politiques à mener à bien des transactions commerciales douteuses, en tirant de substantiels bénéfices de la liquidation d'entreprises publiques en faillite. A l'époque, les deux avocats avaient saisi la justice, et le tribunal avait condamné le journal, car l'article litigieux reposait sur des rumeurs non vérifiées. La condamnation, obtenue en avril 2003, reposait sur la diffamation, les journalistes n'ayant pu apporter la preuve de la vérité de leurs allégations. Le rédacteur en chef avait donc dû payer une amende sous forme d'un versement à une oeuvre caritative et publier des excuses dans Rzeczpospolita.  

En juillet 2004, les deux avocats s'aperçoivent cependant que l'article litigieux est toujours librement accessible en ligne dans les archives du journal, et même parfaitement référencé par Google. Ils saisissent donc de nouveau la justice, pour demander le retrait de cette publication du site de Rzeczpospolita ainsi que la publication de nouvelles excuses. C'est le refus des juges polonais de donner suite à cette double demande qui est à l'origine de la présente décision.

Observons d'emblée que M. Smolczewski a vu son recours déclaré irrecevable, car il l'avait introduit après l'expiration du délai de six mois après la dernière décision de justice rendue par les juridictions polonaises. L'autre requérant, M. Wegrzynowski, voit en revanche, sa requête examinée au fond et rejetée. Cette solution était loin d'être acquise. La Cour européenne aurait pu estimer que la diffamation n'avait pas cessé, puisque l'article n'avait pas été rendu inaccessible. Au contraire, la Cour considère comme fondée la décision des juges polonais qui ont accepté d'examiner la seconde requête, mais ont estimé que l'atteinte aux droits du requérant ne justifiait pas que soit ordonnée la suppression de l'article. 

Le droit au juge et la règle "non bis in idem"

La Cour reconnaît que le droit au juge a été parfaitement respecté. Les juges polonais ont en effet considéré que la règle "non bis in idem"ne s'appliquait pas en l'espèce, l'article sur internet créant un préjudice distinct de la première diffamation. Les recours ont donc été déclarés recevables, et les juges se sont penchés sur le fond de la question, c'est à dire sur l'équilibre entre les droits de la personne diffamée et le droit à l'information. 

Jean Hélion. Le journaliste. 1947


L'équilibre entre l'article 8 et l'article 10

Les droits de la personne diffamée relèvent de l'article 8 de la Convention qui protège l'individu dans sa vie privée. Certes, ces dispositions sont habituellement utilisées pour protéger les droits de la personnes des ingérences de l'Etat dans ce domaine. Mais l'article 8 peut aussi être invoqué lors d'une ingérence d'une personne privée, lorsque l'Etat a manqué à son obligation de prendre des mesures législatives et réglementaires de nature à assurer le droit au respect de la vie privée (par exemple : CEDH, 26 mars 1985, X et Y c. Pays Bas). L'Etat conserve néanmoins une certaine autonomie dans ce domaine, lorsqu'il s'agir d'assurer l'équilibre entre l'article 8 qui protège la vie privée et l'article 10 de cette même Convention européenne qui garantit la liberté d'expression (CEDH, 26 avril 2009 Karako c. Hongrie).

La Cour européenne contrôle cette adéquation entre l'article 8 et l'article 10 opérée par les Etats. Dans une affaire Axel Springer AG c. Allemagne du 7 février 2012, la Cour reconnaît aux journaux allemands le droit de publier plusieurs articles relatifs à l'arrestation pour détention et consommation de cocaïne d'un acteur célèbre, incarnant un commissaire de police dans une série télévision très célèbre Outre-Rhin. Alors même que l'intéressé n'avait pas été jugé, et était donc juridiquement innocent, et que l'atteinte à sa réputation était irréparable, la liberté de presse est considérée comme supérieure à la fois à sa vie privée et au respect de la présomption d'innocence. Il en est de même dans une décision du même jour Von Hannover, à propos d'un journal ayant publié des photos du prince de Monaco très malade. Alors même que ces clichés portaient atteinte à sa vie privée en montrant un homme âgé diminué par la maladie, la liberté de presse l'a une nouvelle fois emporté. Dans les deux cas, la Cour se réfère aux nécessités du "débat public" qui justifient, à ses yeux, l'ingérence dans la vie privée des personnes. 

En l'espèce, la Cour évalue l'équilibre réalisé par les juges polonais entre le droit du requérant de ne pas être diffamé, et le droit à l'information du journal. Elle estime que le maintien de l'article jugé diffamatoire il y a dix ans dans les archives du journal conservées sur internet ne porte pas une atteinte excessive aux droits du requérant. Sur ce point, la Cour prend en considération la spécificité des archives dont la conservation repose sur la volonté de permettre les recherches futures. Elle reconnaît que l'intérêt légitime du public à accéder aux archives de la presse est protégé par l'article 10 de la Convention. Pour la Cour, il ne saurait être question de modifier des archives, de réécrire l'histoire pour la modifier. 

On pourrait évidemment considérer que ce respect des droits des chercheurs, louable en soi, est consacré au détriment de la vie privée des personnes. En réalité, la Cour sanctionne une erreur grossière des requérants. Au lieu de demander la suppression de l'article litigieux, ou à titre subsidiaire, ils auraient dû demander au juge d'ordonner au journal de mentionner la condamnation sur l'article archivé. Tout lecteur de cette archive était ainsi informé que l'article avait été jugé diffamatoire lors de sa publication, avertissement qui réduisait évidemment la crédibilité des accusations qu'il contenait. Les requérants ont omis cette précaution élémentaire, omission particulièrement surprenante si l'on considère qu'ils exercent la profession d'avocat. Rien ne dit cependant qu'ils ne puissent pas faire un nouveau recours, dans l'unique but cette fois de demander au juge d'enjoindre au journal de mentionner la condamnation lors de toute consultation de cette archive.

Après les affaires Axel Springer et Von Hannover du 7 février 2012, la décision du 16 juillet 2013 vient, une nouvelle fois, faire prévaloir la liberté de la presse sur les droits de l'individu. La Cour européenne semble ainsi s'inspirer assez largement du droit américain, qui fait du Premier Amendement relatif à la liberté d'expression une garantie presque absolue. On ne peut que s'en réjouir, même s'il convient désormais de développer d'autres techniques juridiques de nature à protéger les droits des personnes dans ce domaine, en particulier le droit de réponse et le droit de joindre un jugement de condamnation à toute pièce conservée en archive.


vendredi 12 juillet 2013

Dissolution des Jeunesses nationalistes révolutionnaires

Le Conseil des ministres du 10 juillet 2013 annonce la dissolution de trois mouvements de la droite extrême. Les deux premiers "Troisième voie" et "Jeunesses nationalistes révolutionnaires" (JNR) sont des groupements de fait, le second étant généralement considéré comme le service d'ordre du premier. Le troisième, "Envie de rêver" est une association qui abrite le local occupé par les deux précédents. Autant dire que cette dissolution concerne trois mouvements si proches les uns des autres qu'il est impossible de les traiter de manière différenciée. On sait que le décès du jeune Clément Méric est à l'origine de cette triple dissolution. Les cinq personnes mises en examen à la suite de ces faits sont tous sympathisants ou membres de "Troisième voie".

Dissolution, auto-dissolution et intérêt pour agir

Serge Ayoub, le leader de ces groupements, prévoyant l'issue de la procédure, avait déjà annoncé l'auto-dissolution de deux d'entre eux ("Troisième voie" et JNR) après la mort de Clément Méric. Ce même Serge Ayoub annonce aujourd'hui un recours pour excès de pouvoir (qu'il qualifie de recours pour "abus de pouvoir") contre le décret de dissolution. Il annonce même une demande de référé, ce qui montre que l'annonce de l'auto-dissolution relevait de la rhétorique, discours d'autant plus facile que l'auto-dissolution d'un groupement de fait n'implique aucune démarche juridique particulière. En tout cas, le juge devrait reconnaître l'intérêt pour agir du requérant, ne serait-ce que parce que "Envie de rêver", le seul des trois mouvements structuré en association, ne figurait pas parmi les groupements dont Serge Ayoub avait annoncé l'auto-dissolution.

Sur le fond cependant, le recours n'a guère de chances de prospérer. Pour en juger, il convient d'étudier les motifs susceptibles de fonder la dissolution d'un groupement.

Les motifs de dissolution

En l'espèce, il s'agit d'une dissolution administrative, prononcée par décret sur le fondement de la loi du 10 janvier 1936 relative aux groupes de combat et aux milices privées. A l'époque, le texte avait été voté pour dissoudre les ligues et groupes armés qui étaient à l'origine des émeutes du 6 février 1934. Dans sa rédaction actuelle, codifiée à l'article L 212-1 du code de la sécurité intérieure (csi), les motifs de dissolution sont énoncés sous forme d'une liste. Certains sont évidemment inapplicables en l'espèce. Il est clair que l'activité des groupements dirigés par Serge Ayoub n'a pas pour objet de "faire échec à aux mesures concernant le rétablissement de la légalité républicaine", dès lors que cette dernière n'a heureusement pas disparu. Ces groupes ne rassemblent pas davantage d'individus condamnés pour "collaboration avec l'ennemi", ne serait-ce que parce qu'ils sont trop jeunes pour avoir connu la seconde guerre mondiale. Enfin, il est évident qu'ils ne se livrent pas sur le territoire, ou à partir du territoire français, à des actes susceptibles d'être qualifiés de "terroristes".

En revanche, le caractère de "groupe de combat ou de milice privée" peut évidemment être invoqué, notamment dans la mesure où ces groupements remplissaient des fonctions de service d'ordre dans différentes manifestations de la droite extrême, service d'ordre parfois pour le moins musclé. De même, ces mouvements, et plus particulièrement les JNR reconnaissent pratiquer des "actions coup de poing" (ACP), qui sont quelquefois violentes. L'agression de Clément Méric, quand bien même sa finalité n'était pas nécessairement de le tuer, révèle cependant cette violence.

A ce motif s'en ajoute un autre, l'article L 212-1 csi permettant aussi de fonder une dissolution sur le fait que les groupes "soit provoquent à la discrimination, à la haine ou à la violence (...), soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence". Ce caractère discriminatoire est affirmé par les mouvements eux mêmes qui n'hésitent pas à afficher des idées racistes et xénophobes.

L'article L 212-1 csi autorise aussi la dissolution des groupes qui "soit provoquent à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence". Ce motif de dissolution est probablement le plus simple à invoquer, dès lors que ces mouvements affirment ouvertement des idées xénophobes.




Qui sème le vent...

La légalité de la dissolution de ces mouvements ne fait guère de doute, comme il ne fait aucun doute qu'ils renaîtront bientôt sous un autre nom. Pour le moment, il s'agit de groupuscules, d'ailleurs parfaitement bien connus des services de police. Les trois groupes concernés par la dissolution réunissent, en réalité, les mêmes membres, le nombre des activistes étant estimé à quelques dizaines de personnes.

L'enjeu actuel est leur maintien dans la marginalité. Or, force est de constater que ces groupuscules se sont montrés particulièrement actifs durant le débat sur le mariage pour tous. A l'origine peu présents, ils se sont peu à peu imposés, alors même que leur idéologie relève davantage du paganisme que de la foi chrétienne et de l'apologie de la famille. Quatre personnes ayant participé à l'attaque d'un bar gay de Lille le 18 avril 2013 appartenaient ainsi aux JNR. Certes, il ne fait guère de doute que les papas et mamans de la "Manif pour tous" ont été débordés par ces extrémistes et qu'ils ne souhaitaient pas de telles actions violentes. Mais ils devraient tout de même méditer sur le vieux proverbe selon lequel "qui sème le vent récolte la tempête"...






mardi 9 juillet 2013

Le pouvoir de sanction de l'ARCEP

La décision rendue par le Conseil constitutionnel le 5 juillet 2013 sur QPC porte sur le pouvoir de sanction des autorités indépendantes. L'une d'entre elles, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), a infligé une amende de cinq millions d'euros à la société Numéricable en décembre 2011, pour ne pas avoir exécuté une de ses décisions réglant le différend entre cette entreprise et France Télécom, intervenu à propos d'une cession de réseaux câblés. A l'occasion de la contestation de cette amende, la société dépose une QPC portant sur la constitutionnalité de l'article L 36-11 du code des postes et des communications électroniques (cpce), celui-là même qui organise la procédure de sanction mise en oeuvre par l'Arcep.

Des sanctions administratives

L'Arcep n'est pas la seule autorité indépendante à disposer d'un pouvoir de sanction. La plus ancienne de ces autorités, la CNIL, s'est vu attribuer par la loi du 6 janvier 1978 un pouvoir de ce type. Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 12 octobre 2012 affirme d'ailleurs, à propos de l'Autorité de la Concurrence qu'"aucun (...) principe ou règle de valeur constitutionnelle ne fait obstacle à ce qu'une autorité administrative indépendante, agissant dans le cadre de prérogatives de puissance publique, puisse exercer un pouvoir de sanction dans la mesure nécessaire à l'accomplissement de sa mission (...)". Encore faut-il, précise ensuite le Conseil, que l'exercice de ce pouvoir de sanction soit "assorti par la loi de mesures destinées à assurer la protection des droits et libertés constitutionnellement garantis".

Bien entendu, les sanctions prises par les autorités administratives sont de nature administrative et non pas pénale. La plupart du temps, elles font l'objet de recours devant le juge administratif car elles sont l'expression de la puissance publique. C'est le cas dans la présente procédure, la QPC ayant été transmise par le Conseil d'Etat. Dans certains cas, comme en matière de concurrence, le législateur peut cependant décider que la compétence est celle du juge judiciaire, dérogation admise par le Conseil constitutionnel lorsqu'il s'agit d'unifier les contentieux et de faciliter ainsi les démarches du requérant.

Chagall. Jugement de Salomon. Circa 1980


Le principe d'impartialité

En l'espèce, la question posée au Conseil porte sur le respect du principe d'indépendance et d'impartialité que la jurisprudence rattache directement à la séparation des pouvoirs garantie par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Aux termes de l'article L 36-11 cpce, l'Arcep a en effet le droit de s'autosaisir en cas de manquement à la loi ou à une décision . Elle a donc à la fois l'initiative de la poursuite et la compétence pour prononcer la sanction. Pour dire les choses simplement, il est donc reproché à l'Arcep d'être à la fois juge et partie.

La jurisprudence du Conseil constitutionnel ne laisse guère de doute sur l'inconstitutionnalité de la procédure de sanction mise en oeuvre par l'Arcep. Dans une décision du 2 décembre 2011 relative au pouvoir disciplinaire de la Commission bancaire, le Conseil avait déjà affirmé que la séparation des fonctions de poursuite et de jugement s'imposait aux autorités administratives indépendantes. A l'époque cependant, les commentateurs avaient fait observer que la Commission bancaire exerçait dans ce cas des fonctions que la loi qualifiait de juridictionnelles. Moins d'un an plus tard cependant, le Conseil a précisé, dans sa décision du 12 octobre 2012, à propos de l'Autorité de la concurrence, que cette jurisprudence s'applique à toutes les autorités indépendantes, même lorsqu'elles prennent des décisions non pas juridictionnelles mais administratives.

Sur ce point, la décision du 5 juillet 2013 constitue la mise en oeuvre de la jurisprudence antérieure. L'argument selon lequel l'initiative du déclenchement de la procédure de sanction appartient au Directeur général de l'Arcep et non pas au collège de cette institution, dissociant ainsi la poursuite et la sanction, apparaît comme bien faible. En effet, le Directeur ne bénéficie d'aucune garantie d'impartialité et se trouve placé sous l'autorité du Président de l'Arcep.

C'est sans doute la raison pour laquelle le représentant du Premier ministre a préféré plaider l'irrecevabilité de la QPC, au motif que le Conseil avait déjà statué sur l'exercice du pouvoir de sanction de l'Arcep, dans sa décision du 23 juillet 1996. Hélas, cette jurisprudence est déjà lointaine. Depuis cette date, la loi de 1996 créant l'Autorité de régulation des communications a été modifiée à plusieurs reprises, notamment pour céder la place à l'Arcep en 2005. Le Conseil constitutionnel a, de son côté, énoncé que le principe d'impartialité s'applique aux sanctions prises par les autorités administratives indépendantes. Autant dire que les circonstances de droit ont largement changé depuis 1996, changement de circonstances justifiant pleinement un nouvel examen par le Conseil.

Vers l'élaboration d'un droit processuel unique

Cette décision témoigne d'un mouvement général vers l'élaboration de principes de procédure communs aux sanctions administratives et aux décisions juridictionnelles. Les principes fondamentaux issus du droit pénal tendent ainsi à devenir le socle sur lequel se construit un droit processuel unifié. Le législateur a, sur ce point, un rôle fondamental à jouer, puisqu'il va devoir se pencher de nouveau sur le pouvoir de sanction de l'Arcep. Ce serait peut être le moment de réfléchir aux principes généraux de procédure gouvernant l'ensemble de l'activité des autorités indépendantes.

vendredi 5 juillet 2013

Nicolas Sarkozy et sa "démission" du Conseil constitutionnel

Après la décision du Conseil constitutionnel du 5 juillet 2013 confirmant le rejet de son compte de campagne, l'ancien président de la République a annoncé Urbi et Orbi qu'il démissionnait "immédiatement" du Conseil constitutionnel," afin de retrouver sa liberté de parole". La formule fait sourire, car elle comporte deux inexactitudes, l'une de de droit car un ancien président de la République ne peut pas "démissionner" du Conseil, l'autre de fait car Nicolas Sarkozy n'avait jamais renoncé à sa liberté de parole.

Un membre de droit ne démissionne pas

Nicolas Sarkozy est "membre de droit" du Conseil constitutionnel, ce qui signifie qu'il n'a pas été nommé. L'article 56 al 2 de la Constitution énonce simplement : "Font partie à vie du Conseil constitutionnel les anciens présidents de la République". Nicolas Sarkozy, comme tous les anciens présidents de la République, n'a donc eu qu'à signer son procès verbal d'installation, avant de venir siéger et de toucher chaque moins un traitement extrêmement confortable. Il est vrai qu'il ne s'est pas déplacé très souvent, et qu'il a même dû renoncer lorsqu'il a déposé un recours contre la décision de la Commission nationale des comptes de campagnes. N'aurait-il pas été un peu étrange qu'il délibère sur un recours dont il est l'auteur ? Son abstention a permis de protéger un tant soit peu le principe d'impartialité. 

N'ayant pas été nommé, Nicolas Sarkozy ne peut pas démissionner. Tout juste peut-il se retirer et renoncer à son traitement. C'est exactement ce qu'avait fait Vincent Auriol, qui s'est retiré en 1960 pour protester contre le refus du général de Gaulle de convoquer le parlement en session extraordinaire. Rien n'interdit cependant à l'ancien président de la République de revenir siéger plus tard, dans l'hypothèse par exemple où il serait battu à des primaires ou à de nouvelles élections présidentielles.

Lorsqu'il a annonce sa "démission", Nicolas Sarkozy fait donc un gros contresens, qui serait lourdement sanctionné chez un étudiant en droit constitutionnel de première année. De la part de quelqu'un qui, pendant cinq ans, a été celui qui, selon les termes de l'article 5, "veille au respect de la Constitution", cette lacune a quelque chose de surprenant. Pour faire respecter la Constitution, il est tout de même préférable de la connaître un peu. 


 Membre de l'UMP sollicitant les électeurs pour renflouer le parti après l'invalidation du compte de campagne de Nicolas Sarkozy. 
David Teniers II (atelier de). Mendiant. XVIIè s.


Retrouver sa liberté de parole

A l'ignorance succède une certaine mauvaise foi, car Nicolas Sarkozy n'a jamais renoncé à sa liberté de parole. Souvenons-nous qu'en août 2012, il a publié un communiqué mentionnant qu'il s'était "entretenu longuement" avec le Président du Conseil national syrien, ce qui n'a d'ailleurs rien changé à la situation dans ce pays. En même temps, il n'a pas hésité à intervenir dans la crise qui a secoué l'UMP, lorsque messieurs Copé et Fillon se disputaient la direction du parti. Là encore, l'intervention de Nicolas Sarkozy n'a eu aucun effet concret, et avait sans doute pour unique objet de montrer aux militants admiratifs qu'il est là pour les protéger et les sauver, ultime rempart contre les divisions et peut-être, un jour, ultime recours. Bref, l'homme providentiel.

Quoi qu'il en soit, il est vrai que Nicolas Sarkozy récupère une liberté de parole qu'il avait théoriquement perdue. En effet, l'article  7 de l'ordonnance de 1958 interdit aux membres du Conseil de prendre une position publique "sur des questions ayant fait ou susceptibles de faire l'objet de décisions du Conseil constitutionnel".  Il pourra donc désormais critiquer librement la décision qui invalide son compte de campagne. Douce consolation, qu'il partage avec le Comte qui, dans le Barbier de Séville, affirme "que l'on a vingt quatre heures au Palais pour maudire ses juges ? " Il est vrai que Figaro répond "que l'on a vingt quatre ans au théâtre. La vie est trop courte pour user un pareil ressentiment".


Deux levées de l'immunité parlementaire : des paroles et des actes

Ces derniers jours ont vu l'instruction de deux demandes de levée d'immunité parlementaire. La première, adressée au Sénat et concernant Serge Dassault, n'a pas prospéré. La seconde, formulée devant le parlement européen, a conduit à la levée de l'immunité parlementaire de Marine Le Pen. Deux résultats opposés, qui conduisent à s'interroger sur les principes gouvernant cette procédure. 

Définition

L''immunité parlementaire est la conséquence du principe de séparation des pouvoirs. Il s'agit de mettre le pouvoir législatif à l'abri de poursuites judiciaires qui seraient introduites dans un but d'intimidation, qu'elle vienne du pouvoir politique ou des lobbies privés. Pour assurer l'indépendance du parlement, la Constitution assure donc, dans son article 26, celle des parlementaires.

L'immunité parlementaire ne se confond pas pas avec l'impunité, ne serait-ce que parce qu'elle elle limitée à la durée du mandat. Elle offre au parlementaire une double garantie, d'une part une irresponsabilité pour les actions directement liées à ses fonctions, d'autre part, une inviolabilité pour les activités détachables des fonctions. Dans ce second cas, le parlementaire peut être poursuivi, mais toute mesure coercitive est subordonnée à une levée préalable de l'immunité parlementaire.

Pour les parlementaires européens, les principes garantissant l'immunité sont identiques et formulés dans les articles 8 et 9 du protocole n° 7 sur les privilèges et immunités de l'UE. Le règlement du parlement européen EP 006, dont la rédaction actuelle remonte à juin 2012, précise, dans son article 5, que par son régime d'immunité, "le Parlement vise avant tout à conserver son intégrité en tant qu'assemblée législative démocratique et à assurer l'indépendance des députés dans l'accomplissement de leurs tâches".

Procédures

Devant le parlement européen, la demande de levée de l'immunité est adressée au président, puis examinée par la commission à laquelle appartient le parlementaire concerné. Une procédure contradictoire est organisée, et on sait que Marine Le Pen a refusé de venir plaider sa cause devant la commission. Cette dernière établit ensuite un rapport et fait une proposition de décision qui donne ensuite lieu à un vote en séance plénière. 

Sur ce point, la procédure européenne est plus démocratique que la procédure en vigueur devant le parlement français. Aux termes de l'article 9 bis de l'ordonnance du 17 novembre 1958, dans sa rédaction issue de la loi du 29 janvier 1996,  la levée de l'immunité est décidée par le bureau de l'Assemblée concernée, sans aucune vote plénier. 

La demande de levée est formulée par un juge d'instruction, afin de pouvoir prendre à l'égard d'un parlementaire, une mesure restrictive de liberté, par exemple une garde à vue. Elle est d'abord transmise au procureur général près la cour d'appel compétente, qui donne un avis, puis au Garde des Sceaux, qui la transmet au président de l'assemblée concernée. Le bureau de l'assemblée va ensuite désigner en son sein une délégation des immunités, représentative des groupes parlementaires. Après audition de l'intéressé, la délégation établit un rapport, et bureau se prononce sur la levée de l'immunité. 

Le bureau du Sénat est constitué à la représentation proportionnelle des différents groupes parlementaires, et l'écart entre la gauche et la droite est deux sièges (quatorze à gauche et douze à droite). Dans le cas de M. Dassault, la presse mentionne que dix-sept membres du bureau du Sénat sur vingt six auraient participé au scrutin. Sans doute certains sénateurs de gauche ont ils refusé de se prononcer, peut-être ébranlés par l'avis négatif rendu par le procureur. Au delà de ce cas particulier, on voit que cette procédure est le fruit d'un vote émanant d'un petit groupe de sénateurs, qui se déterminent sans doute davantage en fonction de préoccupations politiques que dans l'intérêt de la justice.

Serge Dassault est donc, au moins provisoirement, à l'abri. Marine Le Pen, en revanche, peut désormais faire l'objet d'une audition, d'une garde à vue ou d'une mise en examen. Le premier bénéficie d'un vote bien peu transparent du bureau du Sénat. La seconde fait l'objet d'un vote très médiatisé du parlement européen, et l'opinion est ainsi conduite à considérer que les charges qui pèsent contre elles sont à la fois graves et avérées. 

Les poursuites justifiant les deux demandes de levée d'immunité parlementaire suscitent pourtant des interrogations relatives au fond des requêtes.


 Un exemple d'immunité parlementaire. 
Débat du 18 avril 2013. Assemblée Nationale


Des actes et des paroles

Dans le cas de Serge Dassault, il s'agit de plusieurs enquêtes judiciaires portant sur des manipulations électorales, mais aussi sur une tentative d'homicide. Sur le fond, le refus de levée de l'immunité reposerait sur le fait que le juge envisageait une mesure de garde à vue, sans pour autant montrer l'existence d'indices graves et concordants d'une implication du sénateur. Autrement dit, il peut être entendu comme témoin, sans que son immunité soit levée.

Il n'empêche que les faits visés par l'enquête sont particulièrement graves, et certains relèvent même de la Cour d'assises. Les différentes instructions mettent en cause d'autres personnes que le sénateur Dassault, et le refus de lever son immunité risque, à l'évidence, d'entraver une enquête en cours.

Dans le cas de Marine Le Pen, l'origine de la procédure réside dans une plainte du MRAP, qui lui reproche les termes d'un discours prononcé le 16 janvier 2011 devant les militants du Front National, qu'il convient de citer avec exactitude :

 "Il y a quinze ans on a eu le voile, il y avait de plus en plus de voiles. Puis il y a eu la burqa, il y a eu de plus en plus de burqas. Et puis il y a eu des prières sur la voie publique (...) maintenant il y a dix ou quinze endroits où de manière régulière un certain nombre de personnes viennent pour accaparer les territoires (…). Je suis désolée, mais pour ceux qui aiment beaucoup parler de la Seconde Guerre mondiale, s'il s'agit de parler d'occupation, on pourrait en parler, pour le coup, parce que ça c'est une occupation du territoire (…). Certes y'a pas de blindés, y'a pas de soldats, mais c'est une occupation tout de même et elle pèse sur les habitants."

Il n'y a qu'une seule personne mise en cause, non pas pour des actes mais pour des paroles, non pas pour un crime mais pour un éventuel délit. La levée de l'immunité parlementaire de Marine Le Pen est ainsi demandée "dans le cadre d'une éventuelle action judiciaire relative à une infraction présumée d'incitation à la haine, à la discrimination ou à la violence contre une catégorie de personnes en raison de leur appartenance religieuse". 
 
Il ne fait aucun doute que les propos de Marine Le Pen font amalgame aussi choquant qu'erroné entre l'occupation du territoire par une armée étrangère et la présence d'immigrés sur l'espace public, et c'est précisément cet amalgame qui est à l'origine de la plainte du MRAP. De telles idées doivent  certainement être combattues sur le plan politique, mais constituent elles pour autant une incitation à la haine au sens de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 ? Cela reste à démontrer, et cette qualification reposera finalement sur la libre appréciation du juge. En tout cas, la levée de son immunité parlementaire permet à Marine le Pen de se présenter comme la victime d'un délit d'opinion, une excellente opération sur le plan électoral.

mardi 2 juillet 2013

Garde à vue et rétention en mer

Le 27 juin 2013, la Cour européenne a rendu un arrêt Vassis et autres c. France qui précise l'articulation entre la rétention en mer de personnes arrêtées après l'arraisonnement de leur navire et la garde à vue à laquelle elles peuvent être soumises. En l'espèce, la durée de la garde à vue est jugée excessive, alors même qu'elle ne dépasse pas la durée légale. La Cour prend en effet en considération la longueur d'une traversée maritime, durant laquelle les autorités ont eu le temps de nourrir leur dossier pénal.

Les requérants sont des ressortissants grecs, sierra léonais et guinéens, repérés en janvier 2008 lors de leur passage à Roissy vers l'Afrique de l'Ouest par l'Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS), service rattaché à la direction centrale de la police judiciaire du ministère de l'intérieur. Informé qu'ils avaient loué un navire immatriculé au Panama, le Junior,  pour se livrer à un trafic de stupéfiants, l'OCRTIS demande le concours de la Marine nationale pour procéder à l'interception du navire et à l'arrestation de son équipage. Le porte-hélicoptères Tonnerre remplit cette double mission le 7 février 2008 et réussit à récupérer plus de trois tonnes de cocaïne que l'équipage avait jeté par dessus le bord, au moment de l'arraisonnement. 

Après l'opération, l'équipage du Junior est placé sous le contrôle de douze fusiliers-marins, et le navire dérouté vers Brest sous escorte de bâtiments de la marine nationale. Arrivés le 25 février à 9 h 45, les membres de l'équipage ont été placés en garde à vue à 10 h 50, avec prolongation le lendemain par le procureur de la République, puis le surlendemain par le juge des libertés et de la détention (JLD). Le 29 février enfin, le procureur se dessaisit du dossier au profit de la juridiction interrégionale spécialisée du TGI de Rennes, et la garde à vue s'achève par des mises en examen. En février 2012, les trois principaux accusés sont condamnés par la Cour d'assises spéciale de Rennes à des peines allant de dix à seize ans de réclusion criminelle, les autres membres de l'équipage étant acquittés. 

 Le trésor de Rackham Le Rouge. 1944
Le recours

Le recours devant la Cour européenne ne repose pas sur les peines prononcées mais sur la garde à vue. Les requérants font observer qu'ils n'ont été déférés à un juge d'instruction que plus de vingt jours après leur arrestation, soit dix huit de traversée vers Brest auxquels s'ajoutent un peu plus de deux jours de garde à vue. A leurs yeux, cette durée est excessive et conforme à l'article 5 § 3 de la Convention européenne qui prévoit qu'une personne arrêtée doit être "aussitôt" traduite devant un juge.

Observons d'emblée que, depuis la loi Perben II du 9 mars 2004, la garde à vue peut durer jusqu'à 96 heures en matière de trafic de stupéfiants. Le fait que la garde à vue des requérants ait été prolongée à deux reprises n'est donc pas illicite. De même, le fait que les requérants ait été déférés à une Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) est sans influence sur la question posée. Les JIRS ne sont pas un ordre de juridiction spécifique, mais des juridictions "ordinaires" auxquelles des moyens un peu plus importants sont attribués pour juger des affaires complexes de la criminalité organisée, particulièrement celles nécessitant une coopération internationale. Tel est le cas de l'arrestation des membres de l'équipage du Junion, puisqu'il y a eu coopération avec les Etats Unis qui avaient repéré les suspects mais aussi avec le Panama, l'Etat du pavillon, qui a autorisé l'arraisonnement du navire et le transfert de compétence au profit des autorités françaises.

Une traversée aussi brève que possible

Dans sa décision, la Cour européenne se montre à la fois modérée et ferme. Modérée tout d'abord, parce qu'elle tient compte des "circonstances tout à fait exceptionnelles". Les requérants ayant été arrêtés à 4000 kms de la France, il était indispensable de les ramener sur le territoire pour les juger. Sur ce point, la Cour observe que rien n'indique que le voyage ait pris plus de temps que nécessaire, compte tenu du choix d'un acheminement par la voie maritime, et du fait que le Junior est un navire ancien, conçu à l'origine pour faire du cabotage sur les côtes norvégiennes.

Sur ce point, la Cour applique les jurisprudences Rigopoulos c. Espagne et Medvedyev et autres c. France, dans lesquelles elle a estimé que des délais d'acheminement respectivement de seize et treize jours ne sont pas incompatibles avec l'obligation de célérité mentionnée à l'article 5 § 3 de la Convention.  Celui-ci impose seulement à l'Etat de faire en sorte que l'intéressé soit déféré devant le juge dans un délai aussi bref que possible. Une telle solution laisse ainsi une grande latitude aux Etats pour ramener les intéressés par la voie maritime, avec leur navire. La Cour s'interdit ainsi d'apprécier le moyen de transport employé, entre la voie maritime ou aérienne, voire le choix de remettre les personnes aux autorités d'un Etat plus proche du site de l'arraisonnement.
 

La comparution devant un juge

La fermeté de la Cour apparaît cependant dans l'appréciation de la garde à vue. Elle sanctionne le fait que les requérants n'ont finalement comparu devant un juge que quarante huit heures après leur mise en garde à vue. Elle motive cette fermeté par l'absence de coïncidence temporelle entre le début de la garde à vue et la privation de liberté, cette dernière étant intervenue dix huit jours plus tôt. Dans ce cas particulier, les autorités judiciaires ont eu le temps de préparer le dossier et d'organiser la comparution rapide devant un juge d'instruction, en vue d'une mise en examen. La période de plus de quarante huit de garde à vue était donc inutile, d'autant que toutes les preuves de l'infraction étaient déjà réunies et la Cour donne le détail de tous les éléments découverts lors de l'arraisonnement et de la fouille du navire.

En se plaçant sur le fondement de la durée excessive de la garde à vue, la Cour évite soigneusement le débat sur le rôle du procureur. La question a déjà été tranchée par le célèbre arrêt Moulin du 23 novembre 2010, qui estime que le parquet n'est pas une autorité judiciaire, au sens de la Convention. Cette jurisprudence ne fait cependant pas obstacle à ce que le procureur décide la mise en garde à vue d'une personne, à la condition que celle-ci comparaisse ensuite très rapidement devant un juge du siège. Dans l'affaire Rigopoulos, toute la procédure était, dès l'origine, placée sous le contrôle d'un magistrat du siège, et dans l'affaire Medvedyev la présentation au juge d'instruction a suivi de seulement quelques heures la mise en garde à vue. Ce n'est évidemment pas le cas dans l'affaire Vassis, puisque plus de deux jours s'écoulent entre l'arrivée à Brest et la mise en examen par le juge d'instruction rennais.

La Cour européenne se montre ainsi particulièrement attentive au déroulement de la garde à vue, dans le cas précis de personnes ramenées sur le territoire français après leur arrestation, à l'issue d'un voyage relativement long. Dans ce cas, affirme t elle, les preuves ont été réunies lors de l'arrestation, et il n'y a pas de raison majeure à la prolongation de la garde à vue. Les autorités françaises devront donc, dans l'avenir, veiller à accélérer cette procédure.

En revanche, et c'est sans doute l'essentiel de la décision, en matière de lutte contre la grande criminalité et le trafic de stupéfiants, la coopération internationale ne doit pas être entravée par une jurisprudence trop rigoureuse qui empêcherait de procéder à l'arraisonnement de navires soupçonnés de participer à ce type d'activité. Ce qui est vrai pour le trafic de stupéfiants l'est tout autant pour la piraterie. Sur ce point, la jurisprudence Vassis est une bonne nouvelle pour les militaires français qui participent à l'opération Atalante de lutte contre la piraterie.