Hergé. Le secret de La Licorne. 1943 |
Pages
« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.
lundi 26 novembre 2012
L'UMP devant les juges
dimanche 25 novembre 2012
Participation du public en matière d'environnement
Mode spontané de participation des citoyens à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement (art. 7 de la Charte de l'environnement) |
jeudi 22 novembre 2012
La pointeuse biométrique est en panne
Les Temps Modernes. Charles Chaplin. 1936 |
mercredi 21 novembre 2012
Dissolution de l'Institut Civitas, sur quel fondement juridique ?
dimanche 18 novembre 2012
Licenciement pour appartenance à un parti politique
vendredi 16 novembre 2012
Avocats : les dérives du décret-passerelle
Boycott et liberté d'expression
La décision surprend. On ne pourrait pas à la fois militer pour une cause que l'on estime juste et exercer la profession d'avocat ? Le barreau de Paris vient pourtant, le 28 septembre 2012, d'inscrire Claude Guéant, qui est davantage connu pour ses liens avec l'UMP que pour ses connaissances juridiques. Et Noël Mamère n'a t il pas prêté serment en 2009, sans rien renier de ses convictions écologistes ? Madame Boumediene-Thiery, militante de la cause palestinienne, se voit reprocher d'avoir été poursuivie devant le tribunal correctionnel pour avoir participé à des actions de boycott des produits israéliens ? En quoi cette cause est-elle illicite ?
Rappelons que le boycott fut un élément fondateur des Etats Unis. La Boston Tea Party s'analyse en effet comme le refus de consommer un produit imposé par la puissance coloniale. Plus récemment, le boycott des bus de Montgomery, en Alabama, constitua le point de départ de lutte contre la discrimination raciale. Au plan international, le boycott fut aussi un instrument employé dans la lutte contre le régime d'Apartheid d'Afrique du Sud. Historiquement, le boycott est donc un instrument non pas de discrimination, mais de lutte contre la discrimination.
Le boycott des bus de Montgomery. Alabama. 1955-1956 |
Le droit français se montre, en revanche, très rigoureux en matière de boycott. L'article 225-2 du code pénal qualifie de discrimination "toute distinction opérée entre les personnes morales", notamment lorsqu'elle consiste "à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque". La Cour de cassation, le 22 mai 2012, a ainsi considéré que l'appel au boycott des produits israéliens peut être sanctionné sur ce fondement. De son côté, la Cour européenne, dans un arrêt Willem c. France du 16 juillet 2009, a admis la condamnation par les juges français du maire de Séclin qui avait appelé au boycott des produits israéliens sur le territoire de sa commune. Cet arrêt doit cependant être considéré avec prudence, car la Cour s'appuie essentiellement sur "le devoir de réserve" qui s'impose à un élu local, "lorsque ses actes engagent la collectivité territoriale qu'il représente". Pour la Cour européenne, l'appel au boycott n'est donc pas illicite dans tous les cas, et peut relever d'une démarche individuelle rattachée à la liberté d'expression.
Quoi qu'il en soit, certains juges du fond ont bien du mal à accepter une jurisprudence qui fait bien peu de cas de cette liberté d'expression consacrée par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. Certains ont déjà accueilli favorablement une demande de QPC portant sur la constitutionnalité de l'article 225-2 du code pénal. D'autres préfèrent rendre des décisions de relaxe. C'est précisément ce qui est arrivé à Madame Boumediene-Thiéry, relaxée en octobre 2010 par le tribunal correctionnel de Pontoise.
De quel côté est le militantisme ?
Si Madame Boumediene-Thiéry a été relaxée, elle est donc parfaitement innocente au regard de notre système juridique, et n'a donc commis aucun "manquement à l'honneur et à la probité". En refusant son inscription, le barreau du Val d'Oise ne commet-il pas lui même un acte diffamatoire, de nature à porter atteinte à l'honneur de l'intéressée ? Dès lors que celle-ci doit être entendue dans d'autres affaires liées au boycott des produits israéliens, n'y a-t-il pas aussi atteinte à la présomption d'innocence ? Force est de constater que le barreau du Val d'Oise semble lui-même davantage inspiré par des préoccupations idéologiques que juridiques. De toute évidence, Madame Boumediene-Thiéry n'a pas le monopole du militantisme dans l'affaire.
Aux termes de l'article 16 du décret du 27 novembre 1991, le recours contre la décision du barreau est ouvert devant la Cour d'appel. Le 14 novembre 2012, la Cour d'appel de Versailles a demandé au barreau de reprendre la procédure. En cas d'absence d'accord entre les deux parties, l'affaire sera à nouveau évoquée le 19 décembre. De son côté, le Garde des sceaux annonce son intention d'abroger le décret-passerelle pour le remplacer par un autre texte plus rigoureux prévoyant un examen de déontologie pour les anciens parlementaires demandant leur inscription au barreau. Peut être pourrait prévoir aussi une formation accélérée de déontologie pour les avocats du barreau de Pontoise ?