« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.


jeudi 10 mai 2012

Laïcité, neutralité, et subventions

Le Conseil d'Etat a rendu, le 4 mai 2012, un arrêt Fédération de la libre pensée et d'action sociale du Rhône qui montre, une nouvelle fois, la souplesse du principe de laïcité, et sa capacité d'évoluer avec la société. La fédération requérante contestait la délibération du conseil municipal de Lyon attribuant à l'association Communauté Sant'Egidio France une subvention pour l'aider dans l'organisation des 19è Rencontres pour la paix. Elle considère que cette aide financière va à l'encontre de l'article 2 de la célèbre loi de séparation des églises et de l'Etat qui énonce que "La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte". Le tribunal administratif avait repris ces arguments et annulé la délibération. La Cour administrative d'appel a, au contraire, considéré que cette délibération ne viole pas le principe de séparation des églises et de l'Etat. C'est précisément cette analyse que le Conseil d'Etat confirme dans son arrêt du 4 mai. 

La neutralité

On le sait, le principe de laïcité figure dans l'article 1er de la Constitution, selon lequel "la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale". Il implique d'abord la liberté de conscience. Aux termes de l'article 1er de la loi de 1905, la République garantit donc à chacun le libre exercice du culte de son choix. A ce principe de liberté de conscience s'ajoute celui de la neutralité de l'Etat, qui exclut toute religion officielle et impose à aux autorités étatiques une véritable obligation d'indifférence à l'égard de la religion. Le système français de laïcité repose ainsi sur l'idée que les convictions de chacun doivent être respectées et que la religion relève exclusivement de la sphère privée. 

Pierre Dumont (1884-1936). L'église de Vétheuil. Collection particulière

L'interdiction de financement public des cultes

Dès lors que la religion est un élément de la vie privée, il n'existe aucun financement public des cultes et le clergé n'est pas rémunéré par l'Etat, sauf dans la zone concordataire d'Alsace Lorraine. La loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat autorise néanmoins la création d'associations cultuelles auxquelles ont été dévolus les biens des établissements du culte. Ces groupements, fondés très simplement sur le fondement de la loi sur les associations de 1901, doivent avoir "exclusivement pour objet l'exercice d'un culte".

La jurisprudence traditionnelle se montre très rigoureuse et considère comme illégale toute subvention directe versée à une association cultuelle. Dès lors que ces groupements ont un objet exclusivement religieux, le juge considère que soit l'objet de la subvention est religieux et donc illégal, soit il n'est pas religieux et, dans ce cas, il se situe en dehors de l'objet social de l'association, autre cas d'illégalité (par exemple, dans l'arrêt du 9 octobre 1992, Commune de St Louis c. Assoc. Siva Soupramanien de St Louis).

Les éléments de souplesse

La sévérité de cette jurisprudence n'empêche tout de même pas l'établissement de certains liens financiers entre les collectivités publiques et les groupements religieux. 

Dans l'article 2 de la loi de 1905, figure ainsi l'autorisation de subventionner sur le budget de l'Etat les services d'aumônerie destinés à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics. D'autre part, l'interdiction de subvention n'interdit pas la rémunération de prestations spécifiques. Par exemple, l'administration pénitentiaire peut passer un accord financier avec une congrégation pour assurer la prise en charge des détenus, principe acquis par un arrêt du 27 juillet 2001, Synd. national pénitentiaire FO. La collectivité passe alors un contrat en échange d'une prestation déterminée. Elle ne subventionne pas un culte.

Enfin, rien n'interdit de renoncer purement et simplement à la contrainte imposée par l'association cultuelle, et son principe de spécialité auquel il est bien difficile de déroger. L'Etat ou les collectivités locales peuvent ainsi subventionner des activités d'intérêt général qui s'exercent dans un cadre confessionnel comme des hôpitaux ou des crèches. 

La qualification d'association cultuelle

Dans le cas de l'arrêt du 4 mai 2012, le Conseil d'Etat fait un pas de plus dans le raisonnement. Il se déclare en effet compétent pour qualifier la nature du groupement que la ville de Lyon a subventionné. Il fait ainsi observe que "les seules circonstances qu'une association se réclame d'une confession particulière ou que certains de ses membres se réunissent, entre eux, en marge d'activités organisées par elles, pour prier, ne suffisent pas à établir que cette association a des activités cultuelles". Une association de fidèles, dès lors qu'elle n'a pas pour mission d'organiser le culte, n'est donc pas une association cultuelle. En l'espèce, ce groupement se bornait à organiser un colloque réunissant des participants de différentes confessions. Quand bien même quelques "personnalités religieuses" figuraient parmi les participants, quand bien même les travaux étaient quelquefois interrompus pour permettre à chacun de remplir ses devoirs religieux, le groupement n'était pas une association cultuelle. La ville de Lyon pouvait donc parfaitement subventionner le colloque, sans violer la loi de 1905. 

Certains pourront penser que cet arrêt confère au juge la possibilité d'admettre ou non la légalité d'une subvention à partir de la qualification d'association cultuelle qu'il délivre lui-même. D'autres estimeront qu'une telle jurisprudence exprime une laïcité apaisée, une relation sereine entre les autorités publiques et religieuses.








3 commentaires:

  1. et le concordat d'Alsace-Lorraine, on vit avec dans une même France République indivisible, non? N'est-ce pas une subvention "régionale" provenant d'un impôt "national"?

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  2. En fait les associations dites cultuelles existent sur le fondement de la loi du 9 décembre 1905.

    Par ailleurs, l'Alsace-Moselle n'est pas la seule "entité" en France où la loi de 1905 n'est pas appliquée, il existe de nombreuses dérogations en Outre-mer.

    Et il existe, outre le financement des aumôneries, de nombreuses "inflexions" dans le droit positif par rapport au financement public plus ou moins directe de lieux de culte par exemple:
    - la contribution publique à l'entretien, la conservation, la réparation des édifices cultuels propriétés ou non des associations cultuelles
    - les BEA cultuels
    - la garantie d'emprunt pour les édifices cultuels,
    - ou encore le financement de projet cultuels et ou culturels - sous conditions (intérêt public local, ordre public, contractualisation de la relation. Cf CE, Ass, 19.07.2011).

    En fait cet arrêt du Conseil d'Etat, bien que n'ayant pas trait à des opérations de financement sur des édifices cultuels, se situe bien dans la lignée des cinq arrêts qu'il a rendus l'été dernier (19 juillet 2011) en Assemblée plénière à propos de l'interaction de la loi de 1905 et du principe de non financement public du culte.

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