Le
7 juillet est parue au JO loi la dernière loi de bioéthique. Ce sujet revient périodiquement devant le législateur, simplement parce que tous les textes intervenus dans ce domaine, depuis la loi de 1994, contiennent une clause de révision. Il s’agit en effet de permettre au parlement de réexaminer des dispositions dont le contenu est expérimental, lié autant à l'évolution de la science qu'à celle des idées.
La lecture de la loi récente laisserait supposer que ni la science ni les idées n’ont réellement évolué depuis 2004, voire depuis 1994. En effet, le texte se caractérise … par son vide abyssal. Le rapporteur du texte, le sénateur Alain Milon, a ainsi déclaré : « Nous n’avons pas su faire évoluer notre droit avec la société française ». Fait plutôt, rare, ce sénateur UMP a voté contre le texte..
La loi ne comporte aucune évolution substantielle, aucune innovation d’aucune sorte. Les esprits optimistes diront qu’il n’y a pas immobilisme, mais ancrage dans notre système juridique de principes fondamentaux qui constituent le socle de notre approche de la bioéthique : la dignité de l’être humain, le principe d’inaliénabilité du corps humain, la protection de l’embryon, l’anonymat et la gratuité des dons de gamètes. Il est vrai que ces principes ont permis le développement d’un cadre juridique qui a au moins le mérite de placer le corps humain à l’abri des transactions commerciales. Mais ce résultat, loin d’être négligeable, doit-il pour autant figer toute évolution législative ?
Le texte nouveau ne présente donc aucun intérêt.. si ce n’est pour évoquer les questions qui n’ont pas été abordées et qui sont autant d’occasions manquées.
D’une part, la recherche sur l’embryon demeure interdite, solution acquise à trois voix de majorité. Alors même que cette recherche peut permettre de soigner de graves maladies génétiques, les scientifiques se voient interdire toute recherche dans ce domaine. Nul doute que cette législation soit une aubaine pour les chercheurs des autres pays, et notamment des Etats Unis. Ils ne sont pas soumis à de telles restrictions et vont pouvoir faire breveter leurs découvertes, sans craindre la concurrence française.
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Berthe Morisot
Le berceau |
D’autre part, l’assistance médicale à la procréation demeure inchangée. L’anonymat du don de gamètes est maintenu, ce qui était prévisible, dans la mesure où reconnaître un droit d’accès aux origines aurait pour conséquence de dissuader les donneurs. Surtout, la gestation pour autrui demeure interdite, tout comme l’accès des couples homosexuels à la procréation assistée. Cette prohibition relève d’une appréciation morale que l’on peut tout à fait respecter, mais force est de constater qu’elle incite les couples à se rendre dans des « paradis de bébés ». Aujourd’hui, on s’offre une mère porteuse au Canada ou aux Etats Unis, sur catalogue, pour un prix somme toute relativement raisonnable. Interdire l’acte gratuit en France revient donc à accepter sa commercialisation à l’étranger, et à réserver l’accès à ces techniques aux couples les plus aisés, qu’ils soient hétérosexuels ou homosexuels.
Reste à s’interroger sur les raisons d’un tel immobilisme. La sénatrice Françoise Laborde (RDSE) y voit « l’emprise des milieux religieux les plus conservateurs ». Il est bien difficile de se prononcer sur cette question.. mais on peut on moins adhérer aux propos d’une autre sénatrice, Mme Muguette Dini (centriste), présidente de la commission des affaires sociales, qui a fort opportunément cité Shakespeare : « Much ado about nothing ».
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