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« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.
dimanche 16 mars 2014
La Cour européenne et l'Ukraine : des mesures conservatoires
jeudi 13 mars 2014
De qui Sarkozy est-il le nom ? La protection du nom patronymique
Le nom et la vie privée
Paul Bismuth n'est pas célèbre, du moins il ne l'était pas jusqu'à ce que Thierry Herzog et Nicolas Sarkozy utilisent son nom. Il bénéficie donc d'une protection plus grande, et cette sortie de l'anonymat constitue, en soi, une atteinte à l'intimité de sa vie privée. Celle-ci est alors constituée lorsque le nom d'une personne est divulgué sans son consentement.
Le nom, une "donnée personnelle"
L'usurpation d'identité
Certes, la loi de 2011 visait surtout l'identité numérique et les usurpations d'identité réalisées sur internet. Mais il n'est pas très difficile de considérer que l'identité de Paul Bismuth a été volée à partir d'une fausse déclaration réalisée sur un système informatique, celui-là même qui a permis la création d'une carte de téléphone à son nom.
Il restera à démontrer que l'usurpation a été faite "en vue de troubler la tranquillité de la victime ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération". La formulation évoque davantage une proximité avec l'article L 222-16 du code pénal qui sanctionne les appels téléphoniques malveillants que la situation de Paul Bismuth dont l'identité a été volée un peu par hasard. Pour le moment cependant, la jurisprudence n'est pas fixée, et on peut penser que l'apparition du nom de Paul Bismuth dans une affaire pénale est de nature à "porter atteinte à son honneur ou à sa considération", même si le téléphone n'avait pas été acheté dans ce but.
La voie déontologique
On peut penser toutefois qu'un bâtonnier si attaché à la déontologie ne manquera pas l'occasion d'en faire prévaloir les règles. Sur un plan juridique, la question posée ne manquera pas d'intérêt : Si le secret des communications entre l'avocat et le client est considéré par l'Ordre comme impliquant une véritable impunité des avocats, la commission de disciplinaire devra donc en déduire que ce secret s'impose même si le téléphone a été acquis au moyen d'une usurpation d'identité. Ce raisonnement par l'absurde laissera-t-il subsister le principe de loyauté qui figure dans le code de déontologie ? Il faut l'espérer.
samedi 8 mars 2014
Sarkoleaks : la vie privée des époux Sarkozy bientôt devant le juge des référés
Nicolas Sarkozy et Carla Bruni ont annoncé le 6 mars qu'ils allaient saisir le juge des référés pour qu'il interdise en urgence toute nouvelle diffusion d'extraits ou des transcriptions de ces enregistrements. De son côté, Patrick Buisson annonce son intention de porter plainte pour vol et recel, ce qui revient d'ailleurs à admettre implicitement qu'il est effectivement l'auteur de ces enregistrements.
Le fondement des recours
Le choix du fondement de la vie privée n'est pas surprenant. C'est le seul que Carla Sarkozy puisse invoquer, du moins à ce stade des divulgations, car on ne l'entend réellement que dans une seule conversation, dans laquelle il est question de sa participation aux charges du ménage... Quant à son époux, il n'est guère en mesure de s'appuyer sur un autre fondement. Les conversations actuellement mises à disposition du public ne comportent nulle atteinte au secret de la défense nationale, même si celui-ci ne concerne pas seulement les informations spécifiquement militaires (art. 413-9 à 413-12 c. pén.). De la même manière, l'"atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation" ne peut guère être mise en avant, car elle vise surtout les crimes de trahison et d'espionnage (art. 410-1 c. pén.).
Les divulgations concernent en fait ce noyau dur de l'Exécutif où sont prises les décisions politiques. Nicolas Sarkozy pourrait alors s'appuyer sur le "secret des délibérations du gouvernement et des autorités responsables de l'Exécutif". Hélas, ce secret ne figure que dans la loi du 17 juillet 1978 relative à l'accès aux documents administratifs (art. 6). Il peut fonder le refus de communiquer un document administratif, mais pas la sanction de celui qui a réalisé la divulgation intempestive. Ce dernier ne peut être sanctionné que par la voie disciplinaire, pour manquement à l'obligation de discrétion professionnelle qui s'impose à tous les fonctionnaires "pour les faits, informations et documents dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs fonctions" (art. 26 du statut du 13 juillet 1983). Certes, mais Patrick Buisson n'est pas fonctionnaire, et il ne figurait pas officiellement dans l'organigramme des collaborateurs de la Présidence de la République. Aucun contrat ne lui imposait, semble-t-il, une obligation de discrétion. Nicolas Sarkozy peut aujourd'hui méditer sur les conséquences fâcheuses du choix de s'entourer de conseillers plus ou moins occultes et dépourvus de statut juridique. Il reste donc le secret de la vie privée, qui relève du droit commun et demeure invocable par n'importe quel requérant, y compris un ancien Président de la République.
Il ne fait guère de doute que le secret de la vie privée peut être invoqué à propos des enregistrements de Patrick Buisson. L'article 226-1 du code pénal punit en effet d'un an d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le fait de capter, enregistrer ou transmettre, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcée "à titre privé ou confidentiel". Devant le juge civil, des dommages et intérêts peuvent être obtenus, sur le fondement de l'article 9 du Code civil. Il n'en demeure pas moins que le régime juridique est très différent en matière de captation et de diffusion.
La captation des conversations
L'auteur de la captation est Patrick Buisson. Il ne conteste pas la réalité des faits, puisqu'il se plaint que ces enregistrements lui ont été volés. L'article 226-1 du code pénal, comme d'ailleurs l'article 9 du code civil et la jurisprudence qui s'y rattache, interdisent les interceptions de communications réalisées à l'insu des personnes. En droit français, le principe général est que toute captation de données personnelles est subordonnée au consentement de l'intéressé.
En l'espèce, il n'est guère difficile de prouver que Nicolas Sarkozy et son épouse n'ont pas donné leur accord aux enregistrements. La défense de Patrick Buisson selon laquelle il aurait procédé à ces captations dans le but d'écrire un livre sur son expérience de conseiller du Président ne saurait évidemment écarter l'obligation légale de recueillir le consentement des intéressés. Sur ce point, le Président pourrait, pour une fois, tirer un bénéfice de l'affaire Bettencourt. Dans une décision du 6 octobre 2011, la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation considère que la publication sur Médiapart d'écoutes téléphoniques efffectuées par l'employé de la célèbre milliardaire porte atteinte au respect de sa vie privée, précisément parce que ces enregistrements ont eu lieu à son insu.
Reste tout de même que le couple Sarkozy saisit le juge des référés, dans le but de faire cesser la diffusion des enregistrements. Leur captation n'est pas en cause, car le mal est fait et il est irrémédiable. Il n'y a donc rien à faire cesser, et le juge civil ne pourra que condamner l'intéresser à indemniser le dommage causé. Le problème est que, dans ce domaine, il n'y a pas d'urgence, et le juge des référés devrait donc considérer que la condition d'urgence n'est pas remplie en matière de captation.
La diffusion des enregistrements
En matière de diffusion des enregistrements, la situation est différente. Patrick Buisson n'en est pas responsable, et le recours vise le Canard Enchaîné et Atlantico. Dans ce cas, il est évident que la condition d'urgence peut être remplie, car les requérants sont fondés à penser que ces organes de presse disposent encore d'un nombre indéterminé d'enregistrements qu'ils se proposent peut-être de diffuser en feuilleton. Le juge peut donc faire cesser le préjudice en interdisant toute nouvelle publication.
En l'état actuel du droit, l'interdiction de diffuser les conversations captées à l'insu des personnes est loin d'être absolue.
Dans cette même affaire Bettencourt, statuant cette fois en matière criminelle le 31 janvier 2012, la Cour de cassation a décidé que les écoutes obtenues illégalement peuvent néanmoins être recevables comme éléments de preuve dans différentes procédures pénales. On objectera que, pour le moment, le Sarkoleaks ne donne lieu qu'à une procédure civile, et que cette jurisprudence ne peut pas être invoquée.
En revanche, la jurisprudence de la Cour européenne peut, quant à elle, être directement invoquée devant les juges français. Or, elle fait prévaloir la liberté de presse sur le droit au respect de la vie privée, lorsque la publication répond à un "besoin social impérieux", c'est à dire qu'elle est indispensable pour développer un "débat d'intérêt général". Tel est le cas dans l'affaire Radio Twist A.S. c. Slovaquie du 19 décembre 2006, a propos de la diffusion par une station de radio d'une conversation téléphonique entre deux responsables gouvernementaux, enregistrée par un tiers. Pour la Cour, ce seul fait ne suffit pas à priver l'entreprise de communication de la protection de l'article 10 de la Convention, dès lors qu'il s'agissait de mettre sur la place publique des pratiques grossièrement illégales.
On ne peut qu'être frappé par la similitude entre les faits de la décision Radio Twist A.S. c. Slovaquie et le Sarkoleaks. Dans les deux cas, la conversation a été captée par un tiers, à l'insu des intéressés. Si la captation est illicite, la diffusion elle, peut se révéler licite, dès lors qu'elle présente un intérêt au regard d'un débat d'intérêt général. La publication des enregistrements Buisson relève t elle de ce type de débat ? Sans doute, si l'on considère qu'il s'agit d'informer les citoyens sur le poids d'un petit groupe de conseillers au niveau le plus élevé de l'Exécutif.
Pour une fois, Nicolas Sarkozy a reçu le soutien bien involontaire de Médiapart. En effet, par une décision du 5 février 2014, la Cour de cassation a refusé le renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) présentée par le site d'informations et son responsable Edwy Plenel, QPC portant sur l'article 226-1 et 2 du code pénal. Pour le moment, la Cour de cassation ne reprend pas la jurisprudence de la Cour européenne, restant attachée à une conception rigoureuse qui fait prévaloir le droit à la vie privée sur le droit à l'information.
Le recours des époux Sarkozy intervient donc à un moment où le droit français apparaît de plus en plus isolé, alors que les arrêts de la Cour européenne se multiplient pour considérer qu'une ingérence dans la vie privée peut être justifiée par la volonté de participer à un "débat d'intérêt général". Les juges français vont-ils être tentés de suivre la jurisprudence européenne ? La tentation est grande, d'autant que les enregistrements captés par M. Buisson ne concernent que très partiellement la vie privée des époux Sarkozy. Peut-on réellement interdire la diffusion de l'ensemble des enregistrements au motif que quelques uns d'entre eux reflètent les états d'âme de Carla, qui regrette que son statut d'épouse du Président lui interdise de bénéficier de contrats rémunérateurs ? Le juge des référés va devoir répondre rapidement à cette question.
mardi 4 mars 2014
La révision des condamnations pénales ou comment réparer les erreurs judiciaires
La révision, ou la recherche d'un équilibre
Cette procédure est dans l'état actuel du droit très lourde et n'a que très peu de chances de succès. En matière criminelle, huit condamnés ont bénéficié d'une révision depuis 1945. Sur l'ensemble des condamnations pénales, crimes et délits confondus, les statistiques montrent que sur 3 358 demandes présentées à la commission de révision depuis 1989, seulement 51 ont abouti à une décision d'annulation, soit environ 1,6 %.
Ces chiffres modestes ne témoignent pas, à eux seuls, de l'échec de la procédure. Beaucoup de demandes de révision reposent davantage sur les désirs d'un condamné ou de sa famille que sur des arguments juridiques solides. Si l'on observe les procédures qui ont abouti, on constate tout de même que les conditions draconiennes de la révision ainsi que sa lenteur ont un effet dissuasif, les demandeurs devant faire preuve d'une force de caractère peu commune pour arriver à son terme.
Réhabilitation d'Alfred Dreyfus. juillet 1906. Cour de l'Ecole Militaire |
Révision et réexamen
Ce sentiment d'un chemin de croix judiciaire est accru aujourd'hui par l'impression d'une rupture d'égalité entre les condamnés. Ceux qui ont obtenu un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme sanctionnant la condamnation dont ils ont fait l'objet sont placés dans une situation beaucoup plus favorable que ceux qui doivent engager une procédure de révision. La loi du 15 juin 2000 établit une procédure de "réexamen" d'une décision pénale, consécutif au prononcé d'un arrêt de la Cour, réexamen effectué par une commission spéciale, émanation de la Cour de cassation.
Il est vrai que ce réexamen vise à corriger une erreur de droit alors que la révision se propose de corriger une erreur de fait. Aux yeux du condamné, la différence n'apparaît cependant pas de nature à justifier un traitement aussi différencié. En effet, sur 55 demandes de réexamen présentées depuis 2000, 39 ont été déclarées recevables, et 31 ont abouti, soit 82 % des demandes recevables.
Garanties procédurales
Les motifs de révision
Le "moindre doute"
dimanche 2 mars 2014
Les Invités de LLC : Julian Fernandez : Ianoukovitch à la CPI ? Faux-semblants et vrais défis.
L'Ukraine comme situation devant la Cour : Un Win Win sur le dos des victimes ?
Xavier Gorce. Les Indégivrables. |
L'Ukraine comme situation devant la Cour : Une perspective improbable juridiquement
mercredi 26 février 2014
La "clause de conscience" des maires devant la Cour européenne, une voie sans issue
Le mythe du "dialogue des juges"
De ces deux dispositions, on doit déduire que la Convention s'applique en droit français sur le fondement de l'article 55 de la Constitution, qui constitue, en quelque sorte, le vecteur de l'intégration des traités dans le droit interne. Une décision de la Cour européenne a une valeur conventionnelle et s'impose aux juridictions suprêmes que sont la Cour de cassation et le Conseil d'Etat. De son côté, le Conseil constitutionnel n'apprécie jamais la conformité d'une loi à un traité, fût-ce la Convention européenne des droits de l'homme, et ce principe inauguré dans la jurisprudence IVG de 1975 n'a pas été remis en cause en matière de QPC (décision QPC du 22 juillet 2010).
L'épuisement des recours internes
L'impatience est cependant un vilain défaut, du moins dans le contentieux européen. Il est très probable que la Cour considère que les élus n'ont pas épuisé les voies de recours internes, puisqu'ils n'ont pas attendu la décision du Conseil d'Etat, seule "juridiction suprême" dont la décision est susceptible de clore le contentieux au plan interne.
Qui sont les requérants ?
Les quatorze maires qui déclarent vouloir saisir la Cour européenne étaient-ils les requérants de la QPC contestée ? Certainement pas, puisque l'on sait que ces derniers étaient sept, désignés par leurs initiales dans la décision du Conseil. Il est vrai qu'un certain nombre d'élus avaient fait une "demande d'intervention" dans la procédure, mais le juge constitutionnel a estimé que "le seul fait qu'ils sont appelés en leur qualité à appliquer les dispositions contestées ne justifie pas que chacun d'eux soit admis à intervenir". Leur demande d'intervention a donc été refusée et ils ne sont donc pas "partie" à la QPC. De cette situation, on doit déduire que la moitié au moins des requérants devant la Cour européenne n'étaient même pas partie à la QPC. Leur recours devant la Cour ne saurait donc être considéré comme recevable. Comment pourraient-ils avoir épuisé des recours internes auxquels ils n'étaient pas partie ?
Ajoutons que les maires, qu'ils aient ou non été parties à la QPC, peuvent difficilement se prévaloir la qualité de victime devant la Cour européenne, qualité qui constitue une condition de recevabilité de leur recours. Selon une jurisprudence constante de la Cour, (CEDH, 25 juin 1996, Amuur c. France), l'acte ou l'omission de l'Etat défendeur doit affecter de manière directe le requérant. En l'espèce, les élus ne sont pas directement affectés par la loi qui leur refuse la clause de conscience en matière de mariage pour tous. Aucun d'entre eux n'est actuellement poursuivi pour avoir refusé la célébration d'une union, et la loi ne les contraint pas à un changement de comportement immédiat (CEDH, 26 octobre 1988, Norris c. Irlande).
Certes, la Cour européenne admet quelquefois la qualité de victime "potentielle", lorsque le requérant ne peut pas se plaindre d'une atteinte directe à ses droits, mais appartient à une catégorie de personnes risquant de subir directement les effets de la législation (CEDH, 29 avril 2008, Burden c. Royaume-Uni). En l'espèce, il risque d'être difficile d'invoquer une telle situation, puisqu'un élu qui ne veut pas marier un couple homosexuel peut toujours demander à un adjoint de célébrer une telle union.
Aucune chance au fond
Les obstacles de procédure apparaissent donc immenses, et il semble que les maires requérants aient bien peu de chances de les franchir. Pour les consoler quelque peu, on peut toujours leur apprendre qu'ils n'ont pratiquement aucune chance de succès sur le fond.
Dans une affaire récente du 15 janvier 2013, Lilian Ladele et Gary Mac Farlane c. Royaume Uni, la Cour était précisément saisie d'un recours contre les autorités britanniques qui avaient engagé des poursuites disciplinaires à l'encontre d'un agent ayant refusé d'enregistrer des unions civiles. Cet agent appuyait son refus sur des motifs religieux et se plaignait de l'absence d'une clause de conscience en droit britannique. La Cour rejette ces arguments et rappelle qu'elle "laisse en principe aux autorités nationales une marge d'appréciation étendue lorsqu'il s'agit de ménager un équilibre entre des droits concurrents tirés de la Convention". La loi interne peut donc porter une atteinte, au demeurant très minime, aux convictions religieuses d'une personne, dans le but de garantir l'égalité des droits.
On le constate, le recours n'a pratiquement aucune chance de prospérer. L'irrecevabilité est évidente, et les moyens de fond font cruellement défaut.
Reste évidemment un dernier cas d'irrecevabilité, sur lequel la Cour pourrait s'appuyer. C'est celui qui figure dans l'article 35 § 3 a) : "La Cour déclare irrecevable toute requête individuelle (...) lorsqu'elle estime qu'elle est abusive". Dans un arrêt Bock c. Allemagne du 19 janvier 2010, la Cour déclare ainsi irrecevable une requête "sans enjeu réel", le plaignant contestant la durée excessive d'une procédure civile diligentée pour se faire rembourser une dette de 7,90 €. En l'espèce, les requérants vont devant la Cour pour demander une clause de conscience qui ne sert à rien, puisqu'ils ne sont pas personnellement tenus de célébrer une union homosexuelle. De fait, la requête est motivée par un désir de propagande politique, davantage que par une volonté de protéger une liberté menacée. La Cour pourrait donc sanctionner un tel comportement, et déclarer le recours abusif. D'abord inutile, la requête des élus deviendrait alors ridicule.