« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.


lundi 3 mai 2021

"Passeport vaccinal", "passe sanitaire" : une idée qui fait son chemin


Comment pourrait-on l'appeler, "passeport vaccinal", "certificat de vaccination", "passe sanitaire" ? A moins que lui soit attribuée une couleur, "passeport bleu" ou "rouge" ? Tous ces termes ne sont pas tout-à-fait synonymes. Le "passeport" sanitaire indique l'existence d'un document facilitant le passage des frontières pour les personnes vaccinées contre la Covid-19. Le "passe sanitaire" ou le "certificat de vaccination" renvoie plutôt à l'idée d'une réouverture de certaines activités. On observe toutefois que ces notions sont indifféremment employées pour désigner un document permettant aux personnes vaccinées de bénéficier d'une plus grande liberté de circulation, soit en dehors des frontières, soit bien plus simplement dans l'exercice de leurs activités quotidiennes. 

 

Le passage des frontières


Un État ne peut évidemment définir seul qui sera autorisé à passer une frontière, car il n'est pas compétent pour imposer à un autre État les conditions d'entrée sur son territoire. Un "passeport vaccinal" ne peut donc relever que d'une initiative de l'Union européenne, organisation dont la finalité même est de nature économique, et qui se préoccupe de rétablir aussi rapidement que possible la liberté de circulation des personnes et des biens.

Précisément, le 29 avril 2021, le parlement européen a pris position pour l'ouverture de négociations sur la proposition d'un "certificat vert" numérique, qui a pour but de permettre aux Européens de voyager dès cet été avec un minimum de restrictions, et même d'ouvrir les frontières extérieures aux ressortissants dûment vaccinés de certains États tiers. De manière très concrète, ce "certificat" attestera qu’une personne a été vaccinée contre la Covid-19, ou qu’elle a reçu récemment un test négatif ou encore qu’elle s’est remise de l’infection. Ce certificat devrait s'accompagner d'un code QR destiné à garantir son authenticité, mettant fin à la prolifération de faux tests PCR.

A ce stade, ce certificat européen demeure un objectif à atteindre, sans que l'on puisse présager s'il verra, ou non, le jour. Sa mise en oeuvre est en effet subordonnée au succès d'un "trilogue", entre la Commission, le parlement européen et le Conseil européen, négociation menée par la présidence portugaise. 

Rien n'interdit, en revanche, aux États de subordonner l'accès à leur territoire ou le retour sur leur territoire à la possession d'un certificat de vaccination, et c'est d'ailleurs ce qu'ils font lorsqu'ils imposent un test PCR de moins de 72 heures. Le règlement sanitaire international (RSI) qui lie 196 États membres de l'OMS impose déjà, depuis bien longtemps, la vaccination contre la fièvre jaune, effectuée dix jours avant un voyage vers une zone endémique d'Afrique ou d'Amérique Latine. En France même, ce certificat de vaccination contre la fièvre jaune doit être produit par tout voyageur qui se rend en Guyane. L'article L3111-6 du code de la santé publique énonce ainsi très clairement : "La vaccination contre la fièvre jaune est obligatoire, sauf contre-indication médicale, pour toute personne âgée de plus d'un an et résidant ou séjournant en Guyane".

 


 Elle est Pfizer. Les Goguettes (en trio, mais à quatre), avril 2021


L'exercice d'activités


Les États poursuivent aussi un autre objectif de réouverture d'activités aux personnes vaccinées. L'exemple d'Israël suscite mouvement d'opinion en faveur d'un "passe sanitaire". En effet, les personnes vaccinées contre la Covid-19 y reçoivent un "passeport vert" une semaine après la seconde injection. Ses heureux titulaires peuvent désormais entrer au concert ou au musée, déjeuner dans la salle intérieure d'un restaurant, se refaire une santé dans une salle de sport ou une piscine. Les autres, les non-vaccinés, doivent se contenter des bains de mer et des terrasses des cafés, désormais ouvertes à tous.

Une telle pratique ne peut être mise en oeuvre que si un pourcentage significatif de la population est déjà vacciné et si l'accès au vaccin est assuré de manière satisfaisante. Il est en effet impensable de limiter durablement les droits de ceux qui ne sont pas vaccinés, parce qu'ils sont seulement victimes d'une pénurie de doses.  En outre, il est impératif qu'une immunité collective soit en cours d'installation, puisque le vaccin empêche sans doute de développer des symptômes mais n'empêche pas d'en être porteur sain.

Le débat a démarré très tôt en France, dès l'époque où l'hypothèse d'un vaccin contre la Covid-19 est devenue crédible. Les acteurs de l'économie ont immédiatement vu l'intérêt d'un document permettant la réouverture, même partielle, de certaines activités. D'autres intervenants ont crié à la discrimination, invoquant une rupture d'égalité entre ceux qui seraient vaccinés et ceux qui ne le seraient pas. Aujourd'hui, l'Assurance maladie annonce qu'à partir du 3 mai 2021, les Français recevant leur seconde dose de vaccin se verront remettre une attestation sécurisée contre la fraude qui, grâce à QR Code, pourra être stockée dans l'application "Tous Anti Covid". Cette attestation pourrait ensuite être utilisée, dans des conditions encore mal définies, pour accéder à certains lieux comme les stades, les foires ou les musées.


La compétence de la loi


Pour répondre à cette question de l'éventuelle discrimination induite par un tel document, il faut d'abord observer que sa création relève du domaine de la loi. Dans un arrêt du 15 novembre 1996, le Conseil d'État annule ainsi pour incompétence un arrêté du ministre de l'agriculture imposant certains vaccins aux jeunes gens désireux d'accomplir leur service national dans la sécurité civile en qualité d'agent forestier. Il précise alors que la loi peut seule rendre obligatoire une vaccination.

Dans le cas de la vaccination contre la Covid-19, l'éventuelle mise en oeuvre du "passe sanitaire" devra donc être décidée par le parlement, et donnera sans doute lieu à une saisine du Conseil constitutionnel, fondée sur le caractère discriminatoire de cette mesure.

 

Egalité et non-discrimination 

 

L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 énonce que la loi "doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse (...)". Il est vrai que la création d'un "passe sanitaire" implique une nécessaire distinction entre ceux qui sont vaccinés et ceux qui ne le sont pas. Pour le Conseil constitutionnel cependant, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que "le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général", principe acquis depuis la décision du 16 janvier 1982. Autrement dit, le législateur est compétent pour moduler la mise en oeuvre concrète du principe d'égalité et il peut gérer de manière différente la situation des personnes qui sont dans une situation juridique différente. 

Or la vaccination n'est pas seulement un acte médical. C'est aussi un fait juridique qui peut conditionner l'exercice de certains droits. C'est ainsi que le droit à l'instruction obligatoire n'est accessible qu'aux enfants vaccinés contre certaines maladies, onze depuis 2018, parmi lesquelles la diphtérie, la poliomyélite et le tétanos. Ils ne peuvent être accueillis dans un établissement scolaire que si leurs parents produisent un certificat de vaccination.

Dans le cas des enfants, il s'agit cependant d'une vaccination obligatoire L 3111-1 à L 3111-3 du code de la santé publique (csp). A ce stade, la vaccination contre la Covid-19 n'est pas une obligation, encore moins une "obligation vaccinale déguisée". Il n'est pas interdit de refuser la vaccin, et d'accepter la privation des prérogatives liées au "passe vaccinal" qui est la conséquence de ce refus. Certes, le fait d'être privé de l'accès au stade ou au musée peut être perçu comme une incitation à se faire vacciner, mais ce n'est tout de même pas une obligation juridique.

Reste que le Conseil constitutionnel apprécie la proportionnalité de l'atteinte à l'égalité établie par le législateur, au regard des intérêts publics en cause. Or, il s'est déjà prononcé sur la question de l'obligation vaccinale des enfants dans une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) du 20 mars 2015. Il était alors saisi par des parents condamnés pour avoir refusé de vacciner leurs enfants, sur le fondement de l'article 227-17 du code pénal qui punit de  deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende "le fait, par le père ou la mère, de se soustraire, sans motif légitime, à ses obligations légales au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l'éducation de son enfant mineur". 

En déclarant ces dispositions constitutionnelles, le Conseil précise "qu'il est loisible au législateur de définir une politique publique" en matière de vaccination. Le parlement dispose d'une large marge d'appréciation dans ce domaine, et le Conseil note qu'il peut "modifier (...) cette politique publique pour tenir de l'évolution des données scientifiques, médicales et épidémiologiques". Autrement dit, le Conseil se borne à exercer un contrôle minimum dans ce domaine, estimant que le but d'une politique publique est précisément de mobiliser les connaissances techniques et scientifiques pour assurer la garantie du droit à la santé. Cette analyse pourrait évidemment être appliquée au "passe sanitaire", quand bien même il aurait pour unique objet d'inciter la population à se faire vacciner. Ce n'est certainement pas, en soi, un objectif inconstitutionnel.


Le débat sur le "passe sanitaire" reparaît alors que les vaccinations se poursuivent en France à rythme généralement plus lent que dans d'autres pays. L'immunité collective est bien loin d'être acquise, et les Français vaccinés, heureusement toujours plus nombreux, vont demander à tirer les bénéfices immédiats de leur toute nouvelle immunité. Ils auront évidemment l'appui des professionnels concernés, désireux d'accueillir des personnes prêtes à consommer des biens dont elles ont été longtemps privées. Tout cela joue en faveur du "passe sanitaire", évidemment.


3 commentaires:

  1. Un minimum de "culture scientifique" n'est pas inutile, un récent médecin-maire de banlieue l'a rappelé il y a peu : "une immunité collective soit en cours d'installation, puisque le vaccin empêche sans doute de développer des symptômes mais n'empêche pas d'en être porteur sain."
    1/ l'immunité collective est permise notamment par ceux qui sont vaccinés
    2/ être vacciné vise à développer une réponse immunitaire, donc à produire des anticorps pour empêcher la réplication du virus. Il n'y a pas plus de "porteur sain" que de "porteur malade" d'un antivirus certifié contre le covid-19

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  2. Rachael Fringe6 mai 2021 à 02:10

    Mes éloges sans fin vont à ce collectionneur de sorts très spécial qui mérite d'être imité. Ma vie émotionnelle a pris une forme plus réconfortante après l'intervention du Dr Egwali, qui a été présentée par un de mes chers amis à l'époque où nous pensions tous que c'était fait, tout avait changé. Croyez-moi au début, j'étais sceptique aussi en raison de ma rencontre différente avec un certain nombre de sorciers et de sites Web, tous sur le point de me ramener mon charmant mari facile à vivre. J'étais définitivement convaincu qu'il devait y avoir un endroit fiable, puis Kathy a proposé le dr. L'article d'Egwali et après l'intercession, le médecin a effectué quelques rites et depuis lors, il a été si doux et aimant envers nous sa famille. Aujourd'hui, nous nous sommes remariés et vivons à merveille et maintenant je suis vraiment un vrai croyant, merci encore une fois Docteur .. Vous pouvez le contacter sur cette plate-forme Whatsapp: +2348122948392 /Mail:dregwalispellbinder@gmail.com
    Tous mes meilleurs vœux..xoxo

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  3. "L'immunité collective est bien loin d'être acquise, et les Français vaccinés, heureusement toujours plus nombreux, vont demander à tirer les bénéfices immédiats de leur toute nouvelle immunité." Aux dernières nouvelles, ces "vaccins" contre le COVID-19 ne procurent justement aucune immunité, ce qui en font de bien curieux "vaccins". Ils procurent par contre de très larges profits aux 4 firmes, toutes déjà condamnées par le passé pour corruption active, qui les commercialisent.

    Et quel enthousiasme ! Les "vaccins" en question sont sous AMM au moins jusqu'en 2023, c'est-à-dire qu'on ne sait strictement rien de leurs effets secondaires à moyen et long terme. Ne pouvant donc opérer une balance bénéfices-risques indispensable à tout traitement médical, et indissociable d'un consentement libre et éclairé, cette "vaccination" ne devrait être réservé qu'à un public à risque important de décés (âge moyen de 84 ans, faut-il le rappeler) ou atteint de lourdes commorbidités, sur la base d'une discussion approndie avec son médecin traitant, loin de toute propagande. Le principe de précaution... et le simple bon sens s'agissant d'une maladie avec une si faible mortalité en population générale, et quasi nulle chez les moins de 50 ans, oblige à souhaiter qu'une large part de la population, au contraire, s'abstienne. Dans l'intérêt de la santé de chacun, et probablement de tous, cette "vaccination" aveugle favorisant à l'évidence l'émergence de nombreux variants qui pourraient s'avérer nettement plus dangereux ceux-là.

    Quant à défendre la légitimité d'un pass-sanitaire, faux-nez du contrôle de la population par des Etats toujours plus liberticides, il faut vraiment ne pas manquer de naïveté.

    Bien à vous.

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