« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.


mercredi 26 août 2015

L'expulsion des islamistes étrangers

L'attentat contre le Thalys suscite un débat nouveau sur l'expulsion éventuelle des étrangers résidant en France et fichés par les services de renseignement en raison de leur lien avec l'islam radical. Marine Le Pen demande leur expulsion, sans davantage de précision. François Fillon demande l'expulsion, mais seulement de ceux qui sont incarcérés pour des faits de terrorisme. Quant à Jean-Christophe Cambadélis, il affirme qu'une telle mesure entrainerait l'expulsion de quatre millions de personnes. D'autres enfin assurent qu'elle constituerait une terrible atteinte aux libertés, totalement illégale en l'état actuel du droit. 

Justement, parlons un peu du droit positif qui semble bien oublié dans le débat. Avant toutes choses, il convient de préciser que l'expulsion est une décision administrative qui permet l'éloignement d'un étranger pour des motifs d'ordre public. 

L'expulsion


Par cet objet même, elle se distingue donc d'autres mesures d'éloignement. La reconduite à la frontière et l'obligation de quitter le territoire visent ainsi les étrangers qui ont pénétré ou sont restés sur le territoire de manière irrégulière. Ces mesures sont prises par l'autorité administrative comme l'expulsion, mais elles s'en distinguent à deux égards. D'une part, l'étranger n'est pas reconduit pour des motifs liés à l'atteinte à l'ordre public qu'il peut représenter mais tout simplement parce qu'il n'est pas autorisé à demeurer sur le territoire. D'autre part, l'étranger reconduit peut toujours revenir en France, dans des conditions régulières cette fois, alors que la personne expulsée n'est pas autorisée à revenir sur le territoire.

L'extradition et le mandat d'arrêt européen concernent ceux qui sont demandés par un autre Etat pour des motifs d'ordre pénal. Dans ce cas, la différence est très évidente, car il s'agit de procédures faisant intervenir l'autorité judiciaire alors que l'expulsion est une décision purement administrative.

Des garanties procédurales


Cela ne signifie pas que l'expulsion soit un mesure purement arbitraire, car elle est entourée d'importantes garanties procédurales.

La première d'entre elles, que semble ignorer Jean-Christophe Cambadélis alors qu'elle constitue un principe général de notre droit, est la règle de l'examen particulier du dossier. Applicable à l'éloignement des étrangers, elle figure dans l'article 4 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l'homme qui interdit "les expulsions collectives d'étrangers". Dans son arrêt du 5 février 2002 Conka c. Belgique, la Cour a précisé qu'il est possible d'expulser plusieurs étrangers en même temps, à la condition que chaque cas ait fait l'objet d'un examen particulier. Le Conseil d'Etat s'assure, de la même manière, que l'arrêté d'expulsion a donné lieu à un "examen objectif de la situation particulière" de chacun des expulsés.

La seconde garantie essentielle réside dans le respect des droits de la défense qui donne lieu à une organisation spécifique en matière d'expulsion. Ils s'exercent en effet devant une commission d'expulsion (Comex) composé de deux magistrats de l'ordre judiciaire et d'un conseiller de tribunal administratif. L'étranger est assisté d'un conseil et il dispose de quinze jours pour préparer sa défense. La Comex rend un avis qui est transmis au préfet ou au ministre de l'intérieur qui peut alors décider l'expulsion, par une décision motivée. Elle est susceptible de recours devant le juge administratif qui exerce un contrôle très approfondi sur les motifs de la décision d'expulsion.

Adam et Eve expulsés du Paradis terrestre. Michel-Ange. Plafond de la Chapelle Sixtine.


La notion d'ordre public


L'article 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (ceseda) énonce que l'expulsion peut être prononcée si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une "menace grave pour l'ordre public". Dans le cas des ressortissants de l'Union européenne, la Cour de justice estime même , depuis un arrêt Bouchereau de 1977, que la menace pour l'ordre public doit affecter "un intérêt fondamental de la société", condition plus rigoureuse que le droit commun.

Certes, le plus souvent, l'étranger qui menace l'ordre public est celui qui, précisément, a été condamné par le juge pénal. Le Conseil d'Etat apprécie cette menace à l'aune de la gravité du dossier pénal de l'intéressé. C'est ainsi que, dans un arrêt du 12 février 2014, M. A., il affirme que la présence de sept condamnations sur le casier judiciaire d'un étranger ne suffit pas à fonder son expulsion, dès lors qu'il s'agit de petits délits d'atteintes aux biens. En revanche, la Cour administrative d'appel de Nancy le 23 juin 2014, considère comme justifiée l'expulsion fondée sur une condamnation pour une gravec atteinte aux personnes.


Le fichage "S"



En l'espèce, la question posée est celle d'une expulsion reposant non pas sur une condamnation pénale mais sur le fait que l'intéressé soit fiché par les services de renseignement comme menaçant la "Sûreté du territoire" (fiche "S").

La réponse se trouve fort simplement dans la jurisprudence du Conseil d'Etat. Dans un arrêt du 4 octobre 2004, ministre de l'intérieur c. Bouziane, celui-ci a été saisi d'une décision d'expulsion prononcée par le ministre de l'intérieur et visant l'imam de Vénissieux. Or, cette décision reposait sur des notes des services de renseignement mentionnant que le religieux appartenait à la mouvance salafiste et déclarait que la religion musulmane permettait de battre sa femme. En l'espèce, le Conseil d'Etat mentionne ces notes comme un élément de nature à fonder la décision d'expulsion. Observons que, dans cette affaire, il n'est pas question de terrorisme : l'imam est expulsé parce qu'il tient des propos discriminatoires qui ne sont pas conformes à l'ordre public français.
 

Contrairement à ce qui a été affirmé ici ou là, le droit positif n'interdit pas d'expulser un étranger sur le fondement d'informations communiquées au ministre par les services de renseignement. Il n'est donc pas utile de modifier la loi pour procéder à de tels éloignements. Le contrôle très approfondi du juge administratif sur les motifs de l'expulsion permet en outre d'assurer le respect de l'Etat de droit. Il n'en demeure pas moins que le débat actuel témoigne surtout de la grande ignorance du droit de l'éloignement des étrangers par les politiques. En tout cas, s'ils veulent s'informer, ils sont tous les bienvenus sur Liberté Libertés Chéries.


1 commentaire:

  1. L'expulsion ne doit en aucun cas être le prétexte à une dispense de peine.................
    - les jihadistes étrangers ou double nationaux doivent être jugés, condamnés à des peines incompressibles, emprisonnés, déchus de la nationalité française s'ils l'ont, et expulsés à l'issue de l'exécution de leur peine, au besoin extradés vers leur pays et livrés aux autorités, quelles qu'elles soient...........
    - les jihadistes français doivent être condamnés à des peines incompressibles, aggravées pour trahison, de manière à les retrancher pour très longtemps de la société
    - les assassins sur le territoire français et assassins de citoyens français ne doivent pas être pris vivants; qu'ils relèvent donc de l'armée et des services secrets!
    - leurs sympathisants islamistes étrangers ou double nationaux doivent être expulsés sans délai.
    - les islamistes français doivent être fichés, surveillés et poursuivis pour chaque infraction.
    - les imams étrangers ou double nationaux doivent être déchus immédiatement, expulsés et leurs mosquées fermées définitivement; de même que les mosquées salafistes, intégristes, extrémistes tenues par des français.
    - la totalité des biens personnels et collectifs (à l'exception des armes et des produits des trafics, rackets et vols) confisqués pourraient être mis à disposition des institutions musulmanes françaises modérées............qui sauront comprendre leur intérêt.
    - les financements étrangers doivent être interdits et confisqués sans délai.
    - les relations diplomatiques et commerciales avec les pays du golfe (Arabie, Émirats, Qatar, Koweit, Bahrein, Oman), les autres pays islamistes (Soudan, Libye, Turquie, Indonésie, Pakistan, etc....) doivent être suspendues sans délai; les investissements français de ces pays et de leurs ressortissants placés sous séquestre (tant pis pour les ventes de matériel militaire!).
    A ces conditions, le peuple français reprendre, peut-être confiance.................

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