Des élues écologistes accusent un député récemment démissionnaire de leur propre parti, Denis Baupin, de violences sexuelles et de harcèlement sexuel, pratiques qui se seraient déroulées durant une dizaine d'années. Ces accusations ont été publiées le 9 mai 2016 par Médiapart et France Inter, médias que l'intéressé envisage de poursuivre en justice pour diffamation. De telles révélations ont évidemment suscité beaucoup de commentaires. Il appartiendra, en tout état de cause, à l'enquête préliminaire d'établir les faits.
Pour le moment, et sans porter atteinte à la présomption d'innocence de Denis Baupin, l'affaire offre l'occasion de s'interroger sur les textes applicables. Car les faits reprochés sont extrêmement divers, allant des attouchements physiques au harcèlement par SMS, en passant par la course autour d'une table de réunion. Comment doivent ils être qualifiés juridiquement ? La réponse n'est pas si simple, car le droit récent a considérablement modifié les notions utilisées au point parfois de rendre leur définition incertaine.
Le harcèlement sexuel
Par une décision rendue sur question prioritaire de constitutionnalité du 4 mai 2012, le Conseil constitutionnel a abrogé l'ancienne définition du délit de harcèlement sexuel jugée très imprécise. A la suite de cette abrogation et pour combler ce vide juridique, le législateur est intervenu rapidement avec la loi du 6 août 2012. Le délit de harcèlement sexuel tel qu'il figure dans l'article 222-33 du codé pénal et dans l'article L 1153-1 du code du travail est-il plus précis ? Il comporte désormais deux infractions distinctes.
La première consiste dans "le fait d'imposer à une personne, de
façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui
soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant
ou humiliant, soit créant pour elle un environnement intimidant,
hostile ou offensant". La définition du "comportement à
connotation sexuelle", ou de l'"environnement intimidant" ou "offensant"
n'est pas évidente. La circulaire censée éclairer le texte ne clarifie pas grand-chose en affirmant qu'un "comportement à connotation sexuelle" ne présente pas nécessairement "un caractère explicitement et directement sexuel". Au juge de se débrouiller pour distinguer les deux notions.
Dans le cas des faits reprochés à Denis Baupin, il ne fait guère de doute cependant qu'ils peuvent s'analyser comme des atteintes à la dignité de la personne ou comme la création d'un "environnement intimidant, hostile ou offensant". On songe évidemment à la femme plaquée dans un couloir pendant la pause d'une réunion, ou aux courses autour d'une table etc. Si l'on examine les travaux préparatoires à la loi, on s'aperçoit que, pour ses auteurs, l'élément constitutif du délit réside d'abord dans l'absence de consentement de la victime. Ils ajoutent cependant que cette absence de consentement pourra être appréciée à partir du contexte de l'affaire, par exemple lorsque la victime s'est plainte auprès de ses supérieurs hiérarchiques ou de ses collègues. Tout reposera donc, comme par le passé, sur le témoignage des victimes et de leur entourage.
Reste évidemment la condition de répétition exigée par la loi. La circulaire d'application impose seulement que l'acte prohibé se soit produit "à deux reprises", ce qui constitue, on en conviendra, le minimum en matière de répétition. Sur ce point, la question demeure posée dans le cas de Denis Baupin. Si certaines femmes se plaignent de comportements réitérés comme l'envoi d'une multitude de SMS à connotation sexuelle, d'autres ne mentionnent qu'un seul acte.
La seconde infraction prévue par la loi offre une seconde définition du harcèlement "résultant d'un acte unique". Le second alinéa de l'article 222-33 dispose : "Est assimilé à un harcèlement sexuel" le fait, "même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers". Cette notion de pression renvoie à ce que l'on appelle généralement un "chantage sexuel", par exemple lorsqu'une personne tente d'imposer un acte sexuel à la victime, en lui promettant un emploi... ou en la menaçant d'un licenciement. C'est évidemment ce qui s'est produit dans au moins un cas, lorsque le député aurait affirmé à une salariée du parti qu'elle n'aurait jamais de poste parce qu'elle avait refusé une relation sexuelle.
Dans tous les cas, les peines peuvent aller jusqu'a deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende (voire trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende s'il y a abus d'autorité).
Dans le cas des faits reprochés à Denis Baupin, il ne fait guère de doute cependant qu'ils peuvent s'analyser comme des atteintes à la dignité de la personne ou comme la création d'un "environnement intimidant, hostile ou offensant". On songe évidemment à la femme plaquée dans un couloir pendant la pause d'une réunion, ou aux courses autour d'une table etc. Si l'on examine les travaux préparatoires à la loi, on s'aperçoit que, pour ses auteurs, l'élément constitutif du délit réside d'abord dans l'absence de consentement de la victime. Ils ajoutent cependant que cette absence de consentement pourra être appréciée à partir du contexte de l'affaire, par exemple lorsque la victime s'est plainte auprès de ses supérieurs hiérarchiques ou de ses collègues. Tout reposera donc, comme par le passé, sur le témoignage des victimes et de leur entourage.
Reste évidemment la condition de répétition exigée par la loi. La circulaire d'application impose seulement que l'acte prohibé se soit produit "à deux reprises", ce qui constitue, on en conviendra, le minimum en matière de répétition. Sur ce point, la question demeure posée dans le cas de Denis Baupin. Si certaines femmes se plaignent de comportements réitérés comme l'envoi d'une multitude de SMS à connotation sexuelle, d'autres ne mentionnent qu'un seul acte.
Le Petit Chaperon Rouge. Tex Avery. 1943
La seconde infraction prévue par la loi offre une seconde définition du harcèlement "résultant d'un acte unique". Le second alinéa de l'article 222-33 dispose : "Est assimilé à un harcèlement sexuel" le fait, "même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers". Cette notion de pression renvoie à ce que l'on appelle généralement un "chantage sexuel", par exemple lorsqu'une personne tente d'imposer un acte sexuel à la victime, en lui promettant un emploi... ou en la menaçant d'un licenciement. C'est évidemment ce qui s'est produit dans au moins un cas, lorsque le député aurait affirmé à une salariée du parti qu'elle n'aurait jamais de poste parce qu'elle avait refusé une relation sexuelle.
Dans tous les cas, les peines peuvent aller jusqu'a deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende (voire trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende s'il y a abus d'autorité).
L'agression sexuelle
Les articles 222-27 à 222-30 du code pénal sanctionnent les agressions sexuelles autres que le viol. Elles se définissent, assez largement, comme des atteintes sexuelles "commises avec violence, contrainte, menace ou surprise". Cette infraction pourrait être utilisée dans le cas des violences physiques infligées à la femme qui a été plaquée contre un mur et contrainte à divers attouchements. Dans ce cas, la peine peut être portée jusqu'à sept ans d'emprisonnement et 100 000 d'amende.
Les fondements juridiques d'éventuelles poursuites existent donc. Les victimes sont néanmoins confrontées à deux difficultés. La première réside dans la preuve des faits invoqués. Ont elle gardé les SMS à connotation sexuelle ? Les agressions physiques ont-elles eu des témoins ? En ont-elles immédiatement parlé ? Tous ces éléments sont au coeur de l'enquête préliminaire qui vient d'être ouverte.
La seconde difficulté se trouve dans le délai de prescription. En matière délictuelle, il est, pour le moment, de trois ans. Là encore, l'enquête devra distinguer les faits prescrits de ceux qui ne le sont pas. Rappelons toutefois que la brièveté du délai de prescription n'est pas propre aux infractions sexuelles mais concerne l'ensemble du domaine délictuel. Il serait bon, sur ce point, de se souvenir qu'une proposition de loi Tourret réformant la prescription a été votée en première lecture à l'Assemblée nationale le 10 mars 2016. Elle prévoit l'allongement du délai de prescription de trois à six ans en matière délictuelle. Depuis cette date, le Sénat n'a pas encore trouvé le temps de l'examiner, et c'est bien regrettable.
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