A l'occasion des vacances, Liberté Libertés Chéries invite ses lecteurs à retrouver les Pères Fondateurs des libertés publiques. Pour comprendre le droit d'aujourd'hui, pour éclairer ses principes fondamentaux et les crises qu'il traverse, il est en effet nécessaire de lire ou de relire ceux qui en ont construit le socle historique et philosophique. Les courts extraits qui seront proposés n'ont pas d'autre objet que de susciter une réflexion un peu détachée des contingences de l'actualité, et de donner envie de lire la suite.
Les
choix des textes ou citations seront purement subjectifs, détachés de
toute approche chronologique. Bien entendu, les lecteurs de Liberté
Libertés Chéries sont invités à participer à cette opération de
diffusion de la pensée, en faisant leurs propres suggestions de
publication. Qu'ils en soient, à l'avance, remerciés.
Traité théologico-politique
Baruch Spinoza. 1670
On pense en effet que l’esclave est celui qui agit par commandement et l’homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela cependant n’est pas absolument vrai, car en réalité être captif de son plaisir et incapable de ne rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c’est le pire esclavage, et la liberté n’est qu’à celui qui de son entier consentement vit sous la seule conduite de la Raison.
Quant à l’action par commandement, c’est-à-dire à l’obéissance, elle ôte bien en quelque manière la liberté, elle ne fait cependant pas sur-le-champ un esclave, c’est la raison déterminante de l’action qui le fait. Si la fin de l’action n’est pas l’utilité de l’agent lui-même, mais de celui qui la commande, alors l’agent est un esclave, inutile à lui-même ; au contraire, dans un Etat et sous un commandement pour lesquels la loi suprême est le salut de tout le peuple, non de celui qui commande, celui qui obéit en tout au souverain ne doit pas être dit en esclave inutile à lui-même, mais un sujet […]
De même encore les enfants, bien que tenus
d’obéir aux commandements de leurs parents, ne sont cependant pas des
esclaves ; car les commandements des parents ont très grandement égard à
l’utilité des enfants. Nous reconnaissons donc une grande différence
entre un esclave, un fils et un sujet, qui se définissent ainsi : est
esclave qui est tenu d’obéir à des commandements n’ayant égard qu’à
l’utilité du maître commandant ; fils qui fait ce que lui est utile par
le commandement de ses parents ; sujet enfin, qui fait par le
commandement du souverain ce qui est utile au bien commun et par
conséquent aussi à lui-même.
Eh oui…On ne lit jamais assez Spinoza…
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